Critique : New-York Masala

Patrick Antona | 24 avril 2005
Patrick Antona | 24 avril 2005

Avec New-York Masala (titre à l'exportation de Kal Ho Naa Ho, pouvant être traduit par « Demain peut ne pas être »), nous pouvons à nouveau découvrir sur grand écran ce qui fait à la fois le charme et le succès des films indiens, à savoir ce mélange si particulier de comédie et de mélodrame, le tout bien sûr rythmé par des chansons et des danses. A l'instar d'un Coup de foudre à Bollywood peu inspiré et visiblement trop formaté pour plaire au public occidental, New-York Masla est un vrai film de Bollywood, avec sa dynamique, ses outrances et sa maîtrise absolument parfaite qui en font une oeuvre certes un peu hors norme (au vu de notre culture cinématographique) mais terriblement attachante, arrivant néanmoins à se distinguer des autres films du genre par un traitement résolument moderne (l'action se situe intégralement à New York) ainsi que par une mise en scène très inspirée.

Premier film de Nikhil Advani (mais qui était déjà assistant sur le méga hit Kuch Kuch Hota Hai), ce dernier se révèle être un réalisateur doué, qui en remettrait à n'importe quel artisan occidental, usant de techniques éprouvés tel que le split-screen, le montage accéléré ou le gel de l'image, par lesquels il arrive à insuffler à son récit un style incisif et moderne. De par sa construction, la narration du film se rapproche de La famille indienne (normal vu la présence de Karan Johar au scénario des deux films) à savoir une première partie essentiellement axée sur la comédie, avec comique de situation et dialogues finement ciselés, digne de ce qu'on appelait la « screwball comedy » de l'age d'or d'Hollywood, puis une seconde partie plus mélodramatique, mais qui réussit à faire passer l'émotion sans gâcher aucunement le plaisir roboratif qui nous est communiqué. Et même s'il ont est tenté de penser que les auteurs tirent un peu trop sur la corde sensible (surtout dans la seconde partie), il faudrait vraiment être un triste sir pour ne pas avoir la larme à l'oeil ou à s'esclaffer à la drôlerie des scènes illustrant la lutte sentimentale que se joue le trio vedette.

Car c'est sur ce dernier que réside l'indéniable réussite du film. Bollywood ne serait rien sans ses acteurs (élevés au rang de quasi-dieux par leur public !) et le casting de New-York Masala se révèle être pléthorique. Autour d'un Shah Rukh Khan (Devdas) absolument monumental dans un rôle de démiurge bourré d'énergie qui amène le bonheur autour de lui (une espèce de croisement entre le bon samaritain et notre Cyrano de Bergerac !), on peut ainsi découvrir une autre star masculine, Saif Ali Khan, excellent dans un personnage qui fait un peu penser au Chandler Bing de Friends, et qui réussit l'exploit d'exister face à un Shah Rukh Khan survolté (d'ailleurs la majeure partie des gags du film sont dus à leur confrontation).

On trouve également la délicieuse Preity Zinta, éternelle fiancée dans nombre de mélos indiens, qui arrive à donner une réelle consistance à son interprétation de Naina. Dans le rôle de la femme cherchant la plénitude amoureuse sans risquer de perdre son indépendance, tout en gérant une famille en crise, c'est elle de fait qui représente le modèle d'intégration à la sauce indienne et incarne le véritable catalyseur de la romance à trois qui est le point central du film. De surcroît les seconds rôles ne sont pas en reste et tous leurs interprètes arrivent à rendre cette communauté d'immigrés installée à Manhattan plus que vivante, et même si on nage allègrement dans certains poncifs, ils ne sont en rien bêtifiant et servent à merveille les nombreux sujets abordés dans le film, à savoir le respect des cultures d'autrui, la tolérance religieuse, l'intégration et le lourd poids des secrets de famille. Oui, tout ceci dans un seul film !

Autre ingrédient indispensable pour le film de Bollywood, il se doit que la musique et ses chorégraphies soient plus grand que nature. Pour ses derniers, nous avons droit à des numéros musicaux se basant sur un habile mélange de reprise (Pretty woman en version hindi et désormais culte !), de danse-music (le parodique et entraînant « It's time to disco ») et de classique avec le numéro final « Maahi Ve », où les plus belles stars féminines (de Kajol à Rani Mukherjee) font des caméos ! Inutile de dire que votre serviteur a eu beaucoup de mal à ne pas se jeter sur l'écran ! Côté musique originale, la sublime chanson éponyme du film, Kal Ho Naa Ho, réussit à composer un thème très émouvant qui réussit à habiller le film d'une teneur un brin nostalgique. Une pure merveille.

Alors si le mélange des genres ne vous fait pas peur, si vous voulez voir d'excellents comédiens s'en donnant à coeur joie, se prendre au jeu de numéros musicaux enlevés et joyeux, d'être ému par une histoire d'amour naïve et sans pathos aucun, avec référence karmique à la clé, et par dessus tout découvrir l'incroyable bagout du « Baadshah » (roi) de Bollywood, à savoir l'énergique Shah Rukh Khan, allez voir New-York Masala, et profitez-en, car comme il est dit dans le film, « Demain peut ne pas être » (Kal Ho Naa Ho).

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