Aliens - Le retour : critique "ne la touche pas sale p***"

Florent Kretz | 20 avril 2017 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Florent Kretz | 20 avril 2017 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Ils sont peu à s'être consacrés véritablement et à plusieurs reprises à la science fiction, en changeant ainsi considérablement son visage. Lucas, Spielberg, Verhoeven, Scott... Des auteurs visionnaires divulguant chacun à leur manière leur approche du genre quitte à en redéfinir totalement les courbes. James Cameron est de ceux là. D'ailleurs s'il se fait relativement rare, il tape un grand coup à chaque film, le sieur accompagnant généralement sa puissante et intuitive mise en scène à une nouvelle révolution technologique ! Aliens - Le retour ne fait pas exception à la règle, son géniteur livrant une relecture courageuse voir outrancière d'une œuvre légendaire, dévoilant par la même une perception radicale renforcée par une maitrise technique affolante. Au point même que l'opus de Cameron est devenu un passage obligé doublé d'une incroyable réputation de modèle à suivre pour réussir une bonne suite ! Un chef d'œuvre monstrueux et passionnant qui s'offre, en plus, le luxe de ne pas -trop- souffrir du poids des années! Un film mythique et violent qui vit tout naturellement le jour dans la douleur... 

 

GUERRE ET MÈRE

La phrase est bien connue: « Aliens, le retour est au film de guerre ce qu'Alien est à l'horreur »! Une citation qui résume assez bien la situation, le film de Cameron faisant office de petite révolution au sein du panorama cinématographique. Et même si la formule ne sera pas nouvelle (Heinlein et d'autres auront abordé le thème de la science-fiction guerrière en littérature), la proposition du bonhomme est suffisamment pertinente pour faire son petit effet!

D'autant plus qu'il sait pertinemment ce qu'il fait, Etoiles garde-à-vous! étant son livre de chevet et le jeune homme affectionnant particulièrement les thématiques militaires, l'abnégation et les ressources insoupçonnées de l‘homme. Des axes qu'il n'est pour le moment pas trop parvenu à dévoiler mais qu'il amorce patiemment. Jusqu'ici artiste polyvalent au sein des studios (direction artistique sur Androïde, responsable de matte-paintings pour Carpenter, petite main chez Roger Corman), il vient de vendre le scenario de Rambo II: la mission, suite revancharde des aventures du vétéran du Vietnam le plus stéroïdé de l'histoire. Un job acquis grâce au succès de son premier long métrage Piranha 2 - – Les tueurs volants, suite du film de Joe Dante et carton dans les Drive-in! Une opportunité qui lui permet aussi, courant 83, de faire parvenir à différentes maisons de production le scénario de Terminator, une histoire ambitieuse de science-fiction qui sera développée et réalisée par la suite.

 

Photo Sigourney Weaver

 

 

Un scénario qui plait aux producteurs Walter Hill et David Giler au point de proposer au réalisateur une rencontre. Si les droits de Terminator ne sont plus disponible, la conversation et la présentation des premiers rushs du film les incitent à évoquer le projet du suite au Alien, le huitième passager de Ridley Scott et qu'ils avaient supervisé plusieurs années auparavant. Il se trouve que ce nouveau chapitre, Cameron le fantasme depuis quelques temps déjà : il propose une histoire qu'il a rédigé quelques mois plus tôt, accompagnée en plus d'une note d'intentions d'une cinquantaine de pages. Embauché pour en développer le concept, il doit cependant boucler la production de Terminator et ne livre pas le nouveau script complet: la production attendra mai 85 pour en voir le bout.

Conquis par le traitement ainsi que par le culot du jeune homme, ils ne rechignent pas à le mettre aux manettes de l'entreprise, l'expérience Terminator s'étant en plus conclue de manière miraculeuse. A la tête d'une super production et avec sa fiancée, Gale Anne Hurd, comme productrice associée, Cameron doit tout de même affronter un premier obstacle : l'actrice Sigourney Weaver refuse de participer au film. N'envisageant pas la suite sans elle, il s'oppose aux studios qui l'invitent à réécrire l'histoire sans le personnage de Ripley : refusant catégoriquement, il se fait ami de la belle qui, après quelques négociations financières et artistiques, accepte de reprendre son rôle.

 

Photo Sigourney Weaver

  

Hyper actif et maniaque au possible, James Cameron ne va rien laisser au hasard et obtenir, par la même occasion, les foudres de plusieurs de ses collaborateurs. S'il s'oppose poliment à la contribution de H.R. Giger, plasticien et artiste à l'origine de la forme biomécanique de l'alien, il reprend une grande partie des designs et se les réapproprie: aussi impliqué dans la création des véhicules que dans la mise en chantier des décors, sa plus grande contribution sera incontestablement sa Reine alien qu'il invente de toute pièce ! Un monstre de légende qui réclamera pas moins de seize techniciens entièrement voués à son animation. A ceux-là s'ajoutent les cinquantaines d'autres qui travaillent sur quelques marionnettes impressionnantes. Pour animer les fameux facehungers par exemple, on créé pour l'occasion des prototypes entièrement articulés et motorisés: l'illusion est totale.

 

Photo Sigourney Weaver Le duel mythique jamais égalé

Des techniciens ingénieux à l'instar des décorateurs qui ne renoncent point à l'idée de reconstruire quelques décors du premier volet, disparus sans explication, ou à faire des concessions (ils utilisent des compartiments d'avions pour ne pas dépasser le forfait alloué à la décoration). Car le budget est serré et Cameron déraille gentiment. Il se sépare de son chef opérateur (Dick Bush: Phase IV, Tommy) après un mois de prise de vue pour différents artistiques. Puis il se brouille carrément avec l'un de ses acteurs principaux, James Remar (Les guerriers de la nuit, Cruising) et le fait remplacer illico: bien qu'ayant tourné plusieurs séquences avec le personnage du marine Hicks. Il fait appel à son ami Michael Biehn qui reprend le rôle en lui apportant le charisme qu'on lui connait.

 

Photo Sigourney WeaverBeaucoup vont mourir

 

Biehn doit tenir la cadence alors qu'il n'a pas eu a même préparation que le reste du casting. La trame d'Aliens, le retour mettant en scène une troupe de soldats zélés, Cameron les avait fait s'entrainer durant plusieurs semaines avec la Special Air Service! Une éducation rigide qui ajoute à l'efficacité souhaitée par le réalisateur: certain que le régiment se doit d'être crédible, il réclame à ses acteurs de customiser leurs armures. Alors que l'une d'entre eux fera un clin d'œil à la performance de Marlène Dietrich dans L'ange bleu, le fidèle Bill Paxton dédicace ses actes héroïques à sa compagne Louise, le prénom étant inscrit sur le poitrail du gaillard.

Autres gueules bien connues des adeptes de Cameron : Jenette Goldstein devient l‘amazone Vasquez (Terminator 2 et Near Dark) tandis que Lance Henriksen incarne l'éternel Bishop, androïde à la solde de la Compagnie. Des amis bien précieux sur un tournage qui part en vrille: tourné en Angleterre aux studios Pinewood, le film prend les atours d'une guerre silencieuse. En réaction aux différentes choix de Cameron et à quelques licenciements, les syndicats s'en mêlent et remettent en cause les conventions de tournage, menaçant même de stopper les prises de vue. Pour faire face, le réalisateur met la main à la patte, se montre moins tyrannique et va même jusqu'à utiliser quelques effets conçus pour Pirahna 2. Le budget pourtant conséquent au départ disparait comme peau de chagrin et on doit même créer l'illusion d'une armée d'aliens avec seulement six types en costumes.

 

Photo Sigourney Weaver, Carrie HennRipley, mère et guerrière

 

Une production houleuse qui sera finalement annonciatrice de la suite des événements : pour remplacer Jerry Goldsmith et sa sublime bande son, on fait appel à James Horner qui très rapidement entretient une relation conflictuelle avec le réalisateur. Ne disposant que de très peu de temps et subissant les assauts du couple de producteur/réalisateur, il ressort de ses cartons quelques pistes oubliées et composées pour Star Trek épisodes 2 et 3 et les remanie façon marche militaire. Il jurera qu'on ne le reprendra plus à travailler avec le Jim... jusqu'à leur nouvelles collaboration pour Titanic et Avatar.

La post-production s'éternisera jusqu'à la dernière semaine avant la date de sortie : peu convaincu par le montage, James Cameron tente de le fignoler jusqu'au bout. Un final cut que rejettera catégoriquement Sigourney Weaver qui voit une bonne partie de la profondeur de son personnage disparaitre. 

 

Photo Lance Henriksen

 

Ces quelques nuances ne chagrineront pas pour autant le public. La version salle de Aliens, le retour étant une authentique tuerie: encore aujourd'hui on a rarement vu aussi génial que les vingt-cinq dernières minutes du film de Cameron. La confrontation finale entre Ripley et la Reine étant tout simplement l'un des moments les plus excitants de toute l'histoire du cinéma. Bourrin à souhait et suite implacable, le métrage est une symphonie guerrière dans laquelle se mêle frisson, action, humour beauf et émotion. Car il s'agit bel et bien d'une aventure terrible et magique répondant aux attentes d'un public mixte. Si les garçons y trouveront leur compte en épisodes burnés, la gente féminine ne pourra que se régaler de l'une des thématiques principales de Cameron et qui trouve ici son apogée: la femme forte n'aura jamais été aussi bien décrite par le cinéaste, faisant même passer Sarah Connor pour une figure outrancière. 

 

Affiche officielle

Résumé

Composé de chapitres inoubliables et jamais égalés (la séquence du labo, les combats en armures géantes...), Aliens, le retour offre une alternative intelligente au premier opus. Respectueux de l'œuvre matricielle et de son public, le film de Cameron est assurément la référence absolue.

Autre avis Geoffrey Crété
Un chef d'œuvre, un monument, une référence. Un bulldozer d'efficacité et une montage d'adrénaline. Un portrait d'héroïne intelligent et fin. Un sommet du cinéma d'action-science-fiction. Un travail d'orfèvrerie camouflé derrière un ride infernal.
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Lecteurs

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commentaires
TOD
21/04/2018 à 15:58

AGREE !!!!
En revanche, j’ai toujours eu un problème avec le traitement torpillé des Marines où les 3/4 y passent direct... p-e limite technique de l’époque pour représenter un combat d’envergure avec les Aliens...

Touk
21/04/2018 à 14:47

@moky99

Sors quelques exemples de "vulgarité" dans les titres et note qu'ici c'est juste une citation d'une des répliques les plus cultes de la saga. Et qu'en plus y'a de petits ***.
On a surtout compris qu'il faudra toujours quelqu'un pour râler pour un oui ou pour un non. Et ça, ça n'honore pas grand monde, puisque les réactions les plus intéressantes et constructives sont alors noyées dans la masse de râles.

moky99
21/04/2018 à 14:37

Inclure une vulgarité dans chaque titre d'article ou dans le corps de l'article est votre marque de fabrique ; ça on l'a compris. Mais cela ne vous honore pas du tout.

Dutch Schaefer
21/04/2018 à 12:15

Je sais que je vais me faire des "ennemis", mais depuis l'époque ou j'ai vu ce film en salle (J'avais 13 ans!) et aujourd'hui.... je n'arrive pas à trouver la moindre qualité à cet opus!
Autant j'adore le 1er, et autant je trouve que le Alien3 est une merveille! Par contre cette version "Viet-Nam" merdique de l'alien est risible!
Il y a certainement quelques idées et des moments de bravoure dans cet opus, mais à mes yeux, il reste FAIBLE!
Alors oui, j'avoue, je ne dois pas avoir assez de recul sur ce numéro, mais Cameron était en train de devenir le mec "Hype" du 7ème art et il venait juste après Terminator, mais pour moi... bof!
J'ai revu ce 2ème opus il y a quelques mois et franchement... je n'y arrive pas!
Je dois être un mec perdu dans le désert, mais 30 ans après je n'apprécie toujours pas ce second opus!!!!!!

PS: trois après il réalisait son CHEF D'OEUVRE "Abyss" qui avait 1000 fois plus de talent que ce film!

Marvelous
21/04/2018 à 06:01

@Gnagna

je te rejoint pour Alien mais alors pas du tout pour Terminator !
le 1 er reste un ovni et est juste ENORMISSIME !

Max
21/04/2018 à 00:35

@ Geoffrey Crété

Au temps pour moi, je n'arpentais pas encore les pages d'Ecran Large il y a un an !

Merci pour le lien ;]

(P.S. : ils se couchent tard à la rédac !)

Geoffrey Crété - Rédaction
21/04/2018 à 00:21

@Max

Et même qu'on reparlait de cette version longue dans un récent dossier :)

https://www.ecranlarge.com/films/dossier/981719-alien-retour-sur-une-mythologie-culte-qui-aurait-pu-etre-bien-differente

Max
21/04/2018 à 00:04

J'aime bien regarder les films en VO, mais là j'avoue que « Ne la touche pas, sale p*** », ça sonne mieux que « Get away from her, you bitch! »

Un chouette film avec des personnages très attachants (et comme ce n'est pas précisé, je le signale : une version longue existe).

Marty
20/04/2018 à 22:57

*Voit le titre* "Si y'a pas 5 étoiles je fais un scandale" *clic* ... " ok ... ca va ... "

Eddie Felson
20/04/2018 à 22:54

Bel article. Merci

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