4h44 Dernier jour sur terre : Critique

Simon Riaux | 7 septembre 2011
Simon Riaux | 7 septembre 2011

Cela fait désormais longtemps qu'un film d'Abel Ferrara n'a pas fait l'évènement, pourtant, à chacune de ses apparitions, dès qu'un nouveau projet improbable se met en branle, les spectateurs nostalgiques se prennent à espérer le retour du metteur en scène qui les marqua au fer rouge. Pour autant, avec ce 4:44 Last day on earth, souhaiter un retour en grâce de Ferrara paraît définitivement illusoire, tant il ne reste plus à espérer que l'artiste se retire, et ne s'échine à plus à produire des oeuvres qui ternissent chaque fois un peu plus l'éclat de sa carrière.

Tout commençait pourtant bien, ou pas si mal. Une jeune femme peint sur une toile à même le sol, à ses côtés, Willem Dafoe déambule en se rasant, papillonne de poste de radio en écran de télévision, chacun crache un assommant débit d'informations. La fin du monde est proche, l'humanité va tirer sa révérence. Le volume des appareils de communication monte, une conversation Skype débute sur un ordinateur (la première d'une interminable série, qui occupe un bon quart du film), et là, tout s'écroule. Après ce premier plan réussi (profitez-en, ce sera le seul, l'unique) Ferrara ne parvient plus qu'à éructer un flot continu d'images d'une laideur sans nom, probablement glanées ici et là sur Youtube, qui n'ont pas plus de valeur esthétique que symbolique. Jusqu'à la conclusion de cette lente agonie filmique, nous n'aurons presque exclusivement plus droit qu'à des conversations numériques, du chat, des coups de fil, et quelques dialogues creux. Les écrans ont phagocyté l'intérieur de l'image, mais sans avoir rien à nous dire, ni de propos à servir.

 

 

Il en va de même des acteurs, qui n'ont aucune idée de quelle direction prendre. Dafoe s'esbaudit sur l'horreur de sa fin prochaine depuis le toit de son immeuble, pleure devant son Mac, supplie le livreur de nouilles vietnamienne de lui donner son nom, sans jamais se départir d'une mine ahurie qui paraît plus adressée au metteur en scène et au spectateur qu'à Shanyn Leigh, qui interprète sa compagne. Cette dernière surjoue dans des proportions atmosphériques, et rend insupportable à peu près toutes les phrases qui s'échappent de sa bouche. La pauvre est desservie, il est vrai, par des dialogues qui tiennent de la blague carambar autant que de la dissertation de lycéen dépressif. Au moins aura-t-elle la décence de régulièrement interrompre ces tunnels dialogués d'une séance de déshabillage et/ou de jambes en l'air, seul dispositif prompt à maintenir l'attention du spectateur.

 

Résumé

Il y aurait encore beaucoup à dire sur la désespérante vacuité d'un projet qu'on rêvait meilleur, mais de toute évidence, Abel Ferrara n'a plus rien à nous dire, et il serait aussi vain que cruel de s'acharner sur un travail que l'on peine à qualifier d'oeuvre. 4:44 Last day on earth ressemble peut-être à la fin du monde dont rêve le metteur en scène, et l'on sent régulièrement la personnalité de son auteur poindre à fleur de film, c'est bien là la seule valeur de l'ensemble.

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