Donbass : la guerre oubliée, le documentaire choc à voir en ce moment

Christophe Foltzer | 26 février 2017 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Christophe Foltzer | 26 février 2017 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Nous parlons peu de documentaires sur EcranLarge, et encore moins de films qui semblent éloignés de notre ligne éditoriale. Mais il arrive parfois que nous tombions sur des oeuvres envers lesquelles nous estimons importants d'en devenir le relai. Comme avec Donbass, la guerre oubliée.

Précisons d'emblée que Donbass, la guerre oubliée ne parlera pas forcément à ceux qui ne jurent que par Marvel ou DC Comics ou qui se matent les productions Jason Blum en boucle. Ici, nous sommes dans la vraie vie, dans le désert du réel et ce n'est pas beau à voir. Pourtant, il nous semble important de vous en parler et de vous dire pourquoi, à notre avis, il est nécessaire de ne pas détourner le regard. 

 

Photo Donbass

 

Alors que l'on parle tous les jours de la menace djihadiste, de la prise de Mossoul, de l'enfermement progressif des Etats-Unis repliés sur eux-mêmes sous l'influence du président Trump, il se passe plusieurs tragédies, bien de chez nous, en Europe, à quelques heures de vol de Paris et qui anéantissent des populations dans l'indifférence générale. En 2014, le président ukrainien Porochenko engage une véritable guerre contre une partie de sa population située à la frontière Est avec la Russie, le Donbass, à l'encontre de séparatistes russes qu'il estime pilotés à distance par Vladimir Poutine. Le tout avec l'assentiment de l'Europe. Résultat, plus de 10.000 morts, 3 ans de conflits qu'aucun traité de paix n'a pu endiguer, une population massacrée, en majortié des ouvriers et des mineurs. Nous sommes loin du portrait classique du dangereux terroriste.

Anne-Laure Bonnel s'est donc rendue sur le terrain en 2015 pour voir de ses propres yeux ce qui s'y passait et en rapporter des images pour nous, population au regard en biais qui n'en a probablement jamais entendu parler. Pour que les gens sachent, pour qu'ils aient envie de comprendre. Autant dire que le retour à la réalité fait très mal.

 

Photo Donbass

 

REGARDE LES HOMMES TOMBER

En 53 minutes, la réalisatrice se pose avant tout en témoin de l'horreur. Pas de politique, ni d'engagement moral ou de prosélytisme nauséabond, seuls comptent les faits. Parcourant la région du Donbass, Anne-Laure Bonnel rencontre les premières victimes du conflit, les populations civiles. Sous le coup de bombardements incessants, ces hommes et ces femmes qui ont tout perdu nous présentent leur quotidien, entre peur et survie, au beau milieu duquel rayonne pourtant encore un espoir que tout s'arrête et qu'ils puissent se remettre à exister. Les images et les différents récits ne nous épargnent rien, c'est terriblement beau et horriblement émouvant.

Ce qui choquera le spectateur le moins au fait des réalités de ce monde, c'est de constater à quel point les premières victimes du conflit nous ressemblent. Leurs villes détruites ressemblaient aux nôtres, leurs aspirations aux bonheurs simples de la vie sont similaires, nous ne sommes tous que des êtres humains, subissant des enjeux qui nous dépassent et dont nous n'avons que les plus terrifiantes répercussions. On ne peut que saluer cette approche objective des faits, impliquée émotionnellement mais bien consciente que tout effort d'analyse de la situation la conduirait dans l'impasse.

 

Photo Donbass

 

Cependant, une mise en garde s'impose : ce film n'est pas à mettre entre toutes les mains. A la destruction et à la désolation s'ajoutent également quelques plans incroyables pris sur le vif après un nouveau bombardement. Nous y découvrons des cadavres, des blessés, des brûlés, le récit terrible des exactions des militaires ukrainiens... Mais cette violence est obligatoire, voire indispensable pour bien comprendre ce qui se passe. Comme souvent, ce sont ceux qui n'ont rien demandé qui s'en prennent le plus et payent les conséquences d'une géopolitique aux intérêts flous et déshumanisés. Comme toujours on cherche à comprendre pourquoi cela nous arrive et l'on n'est pas prêt d'oublier cette vieille dame qui y voit là une punition divine parce qu'elle s'est détournée de Dieu.

 

Photo Donbass

 

Donbass, la guerre oubliée est un témoignage fort et indispensable qui nous rappelle notre propre responsabilité dans les grands conflits du monde en tant que nation et en tant qu'Europe. Si l'équilibre entre les peuples n'a jamais été aussi fragile qu'en ce moment, c'est peut-être en regardant des films comme celui-ci, en comprenant la situation globale, que nous pourrons commencer à penser à une manière de changer les choses. Comme le conflit que subit le Donbass actuellement, le chemin sera long et douloureux et nous nous questionnerons toujours sur le sens profond de ce qui se passe. Mais c'est grâce à de tels documentaires que nous pourrons faire un pas supplémentaire vers l'amélioration, en nous rappelons que nous sommes avant tout pareils à l'origine et que ceux qui souffrent ne souffrent pas pour une bonne raison, mais peut-être parce qu'ils ont eu moins de chance que nous. Pour le moment en tout cas.

 

Terriblement beau et triste, Donbass, la guerre oubliée prend à la gorge du début à la fin en nous révélant un pan honteux de notre histoire actuelle. On ne peut que saluer Anne-Laure Bonnel de nous avoir rapporté un document aussi exceptionnel et fort en espérant que cela éveillera quelques consciences. A l'heure de la désinformation, du tout émotionnel et des "fake news", voir ce film est obligatoire. Disponible sur le site Spicee.

 

Photo Donbass

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commentaires
Marilyn
25/03/2022 à 05:27

Un documentaire exceptionnel. À voir absolument

#humanity
17/03/2022 à 16:04

La vidéo a été censurée, que je clique sur le lien erreur 404......

Mino
11/03/2022 à 18:07

Merci pour la réponse, je comprend tout à fait. Un bon point pour vous, continuez le boulot les gars ! Toujours au top ! <3

Christophe le Foltzer
10/03/2022 à 18:03

@Mino
Dans la mesure où la confusion est totale actuellement concernant le conflit ukrainien, pas sûr que ce soit judicieux de le remettre en une.

D'autant plus que nous ne pouvons être certains à 100 % qu'il n'y ait pas de mise en scène à un moment ou un autre dans le documentaire. Ce qui est malheureusement le lot de toute œuvre traitant du réel.

Néanmoins, je tiens à préciser que l'avis sur le docu ne rejoint aucune idéologie particulière, pro ou anti. Il s'agit avant tout de se faire une opinion sur ce que l'on nous montre dans l'œuvre.

Ecranlarge ne se réclamant d'aucune propagande, mise à part la passion du cinéma, remonter cet article dépasserait le but premier du site. D'autant qu'il s'agirait alors de capitaliser sur l'horreur et le malheur humain, ce qui est contraire à l'éthique de toutes les personnes de la rédaction, passées ou actuelles.

Mino
10/03/2022 à 15:00

Alors, si on est sur a 100% que rien n'a été mis en scène, il va peut être falloir rebalancer cet article en une vous croyez pas? Histoire de partager du contexte vis à vis de la crise actuelle, et comme vous dîtes, à l'heure de la désinformation de masse des deux camps...

Joe Staline
27/02/2017 à 10:21

Zut alors, on nous aurait menti ? Ce ne sont pas les méchants Russes contre les gentils Ukrainiens ?

Copeau
26/02/2017 à 18:15

J'ai eu la "chance" de le voir...chance ce n'est peut-être pas le bon mot tant le visionnage a été difficile. Si triste, si triste...ce qui le rend tellement beau aussi. Drôle de paradoxe pour un visionnage qui ne peut pas laisser indifférent...A VOIR !