Gérardmer 2015 Jour 1 : de la blanche coupée au sang

Simon Riaux | 30 janvier 2015
Simon Riaux | 30 janvier 2015

Après une trentaine d'heure à Gérardmer, un premier bilan s'impose. Alors que cette édition 2015 se transforme en survival improvisé grâce à des éléments déchaînés, notre envoyé spécieux vous confie ses impressions, entre deux films de genre sévèrement burnés et quelques chopines réconfortantes.

Dans un contexte où le grand public hexagonal semble superbement ignorer les productions déviantes, alors que la distribution en salle du cinéma de genre tend à devenir l'exception et tandis que la concurrence Festivalière s'accélère un peu plus chaque année, nombreux étaient les mauvaises augures qui prédisaient à Gérardmer un avenir difficile.

Et pourtant, on risque de se souvenir un moment de cette 22ème édition, qui démarre en fanfare. Isolée du reste du monde par un manteau neigeux exceptionnel, qui effraie jusqu'aux autochtones les plus aguerris, la cité Vosgéenne abrite cette année une tripotée de films essentiels et autres productions détonnantes.

Les hostilités ont été brillamment ouvertes par Ex_Machina, premier film d'Alex Garland, qui signe ici une fable de SF épurée, stylisée et remarquable d'intelligence. Les festivaliers habitués des pantalonnades d'ouverture (ici et là, entre deux vins chauds, des forcenés évoquent encore la funeste tartine de Devil), sont nombreux à être restés un tantinet baba.

Parce qu'on fait bien les choses chez EcranLarge, on a donc rencontré le monsieur, et c'est par ICI que ça se passe. Nous vous offrirons un compte-rendu plus exhaustif de cet échange aussi dense qu'électrique à l'approche de la sortie du film.

En guise d'apéritif, dites vous qu'Alex Garland ressemble à ses écrits, polyvalent, touche-à-tout et parfois fulgurant, il bondit d'un sujet à l'autre, triture son interlocuteur et transforme une séquence promo en débat nerveux sur la survie de l'humanité. Rien que ça.

Parce que le Festival ne serait pas Gérardmer sans quelques scènes choc, on a également apprécié la dimension ludique de Goodnight Mommy, petite blagounette autrichienne où d'adorables marmots font subir à leur môman ce que tout un chacun rêve d'infliger à une armoire Ikéa récalcitrante. Trop transparent, pas assez maître de son propos et finalement trop complaisant pour son propre bien, le film s'est toutefois imposé comme un temps fort grâce à sa radicalité. Autre point fort, il établit de manière certaine que la colle forte et les ciseaux font de piètres instruments de dentisterie.

Parce que la réflexion et les chocs craspec c'est bien, mais pas assez, le Festival nous aura également offert un moment des plus remarquables grâce à l'hommage rendu à Robert Rodriguez.
Soit l'occasion de voir le fumiste le plus attachant de l'univers monter sur scène tel un Zorro post-moderne, habillé en quasi Mariachi, ce qui vaut son pesant de cacahouètes.

Les détracteurs auront grincé des dents, les fans se seront gentiment fait dessus, ce qui est encore une fois signe que cette 22ème édition sait enflammer son public comme rarement. Et puis, cela n'a pas de prix, nous aurons de surcroit eut la chance d'entendre Robert Rodriguez nous expliquer à demi-mots que même James Cameron lui tressait des louanges, tandis que Francis Ford Coppola se considérait un peu comme son élève.

Les Texans sont magnifiques.

Et parce qu'une claque ne vient jamais seule, nous avons découvert Cub, série B Belge (ça ne s'invente pas) où une troupe de scouts se fait bravement dézinguer par un couple de boogeymen enragés.

Extrêmement référentiel, jouant dans un sous-genre très limité, le film n'en est pas moins une très jolie réussite, esthétiquement soignée, dont l'amoralité nous fit bouillonner le sang comme jamais. Notons qu'on aura rarement vu des louveteaux se faire éparpiller avec tant de cruel enthousiasme.

Mais Gérardmer est aussi un haut lieu d'enseignement. De ces projections furieuses on ressort souvent pensif, envahi par la pénétrante profondeur d'une leçon de vie inattendu.

Ainsi, on aura appris grâce à The Signal (disponible en VOD dès à présent) que Laurence Fishburne est branché sur secteur. De même, avec une pertinence bienvenue, l'inénarrable The Man in the orange jacket nous aura appris qu'uriner sur des prostituées avant de leur demander un petit léchouillage de gonades en règle n'était pas un gage de soirée réussie.

Nous arrêtons ici ce compte-rendu inaugural, qui devrait être suivi par d'autres nettement plus épique, les œuvres les plus attendues de la compétition étant encore à venir, avec notamment It Follows et The Voices.

Enfin le week-end approchant et certains confrères (dont le code pénal nous interdit de citer les noms) étant actuellement sur le point de nous rejoindre, il y a fort à parier que nous vous gratifieront de sympathiques anecdotes, à base de délits mineurs.

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