Les Ogres : quand les théâtreux illuminent les salles obscures

Chris Huby | 16 mars 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Chris Huby | 16 mars 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Une troupe de théâtre passe de ville en ville. Entre drames personnels et soucis du quotidien, ils forment une famille qui préfère aller au-delà de ses faiblesses pour n’en tirer que fierté et partage.

Le deuxième long métrage de Léa Fehner (après Qu'un seul tienne et les autres suivronti en 2008) a ceci de particulier qu’il entre dans l’intimité profonde d’une troupe de théâtre qui existait déjà auparavant. La metteur en scène met en effet ses parents au milieu du film, non seulement en les faisant jouer, mais aussi en reprenant nombres d’anecdotes familiales qui ont jalonné 25 ans de carrière. Il en sort une oeuvre riche et foutraque, à la fois réjouissante et sensible, intelligente et fine.

Les deux histoires principales se répondent régulièrement sans jamais se marcher l’une sur l’autre. Deux couples se déchirent pour des raisons différentes. Alors que le directeur de la troupe engage une de ses anciennes amantes, le joueur de flute culpabilise à outrance à propos de la mort de Thomas, son petit garçon, à l’aune d’une nouvelle naissance pour lui. Ces histoires intimes sont tout autant de prétextes pour narrer les origines et les galères de chacun des personnages se retrouvant itinérant.

affiche

Car là est bien le fond du film. La fuite constante dans le spectacle et dans le rêve fabriqué empêche de temps en temps de se retrouver cloué par les problèmes du quotidien, aussi sombres soient-ils. A la manière d’un Fellini, la réalisatrice peint un tableau mélancolique d’individus à fleur de peau qui ont pourtant conscience de leur sort, et qui font tout pour respecter les limites du groupe. Pour mieux survivre et oublier leur statut de galérien.

Les acteurs sont excellents, notamment ceux qui créent les deux couples. François Fehner et Marion Bouvarel d’un côté, Marc Barbé et Adèle Haenel de l’autre. Ils sont dirigés d’une main de maitre, et on remarquera de nombreuses séquences intimes d’une grande intensité. La mise en image, majoritairement en steadicam, est extrêmement dynamique, rude, liant ou déliant les personnages entre eux, dans une grande forme régulatrice et nécessaire.

Au-delà de son aspect émotionnel qui tire parfois vers le mélodrame, il pose la question du statut du vagabondage/itinérance et de l’occupation de l’espace du quotidien. L’existence coulant comme un flot aux vagues incertaines, les artistes sont montrés ici comme les premières victimes de leurs émotions et de leur égo. Le groupe et la famille sont donc proposés par le film comme autant de solutions au vide existentiel et à la folie.  

Résumé

En conclusion, il s’agît d’un deuxième long-métrage réussi, à connaitre absolument, qui se distingue par un brio narratif et par son jeu tout en finesse.      

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