Serena : la critique glamour

Christophe Foltzer | 12 novembre 2014
Christophe Foltzer | 12 novembre 2014

Bradley Cooper et Jennifer Lawrence sont inséparables. Après Happiness Therapy et American Hustle, ils partagent encore une fois l'affiche pour le nouveau film de Susanne Bier. Un film bien plus malin que ce que l'on pourrait croire.

En jouant d'emblée la carte de la grande fresque romanesque, Serena tente un pari risqué, celui de proposer un traitement glamour à l'ancienne dans le Hollywood d'aujourd'hui. Il est vrai que ce drame entre un entrepreneur de Caroline du Nord et une mystérieuse femme qui va changer sa vie pour le meilleur et pour le pire rappelle de grands classiques. Un classicisme qu'on lui reprochera forcément puisque rien ne surprendra jamais vraiment le spectateur.

Des cadres magnifiques aux environnements exceptionnels, en passant par le jeu très solide des comédiens, tout semble logique, attendu, cliché. Les différentes péripéties du couple ne surprendront pas non plus, et l'on pourra regretter de nombreuses longueurs et quelques raccourcis de scénario parfois gênants, sans parler d'envolées sentimentales un peu trop appuyées et grandiloquentes. On aurait tort d'en rester là, car le coeur du film est autrement plus intéressant que son postulat académique.

En fait, Susanne Bier a moins signé une histoire d'amour qu'un film à charge contre le libéralisme. En situant le film dans l'Amérique post-Dépression, la réalisatrice danoise tisse des liens troublants avec l'époque que nous vivons actuellement. Celle d'une puissance meurtrie, diminuée, qui vient de subir un gros revers économique et qui table tout sur l'exploitation aveugle des ressources naturelles pour s'en sortir, au mépris de l'environnement et de la vie humaine. Les personnages de Bradley Cooper et Jennifer Lawrence deviennent ainsi les incarnations d'un capitalisme blessé, succombant aux charmes d'un libéralisme envoûtant et sauvage, qui ne supportera aucune concurrence.

Pris sous cet angle, le film fonctionne parfaitement et la démonstration est aussi intelligente qu'effarante tant le film se permet de plonger ses personnages dans une noirceur que l'on attendait pas forcément. L'utilisation des hommes et la manipulation du sentiment amoureux à des fins obscures (d'où les quelques envolées grandiloquentes) n'en sont que plus éclatantes et, de ce point de vue, le film est une grande réussite et un extraordinaire numéro d'acteurs.

Résumé

Pas très original, ni surprenant, Serena est pourtant loin du film bêtement glamour que nous vendait l'affiche. Visuellement superbe et techniquement solide, il détourne habilement les codes d'un genre pour remettre un certain nombre d'aspects de notre quotidien en question. Audacieux et fort.

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Lecteurs

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commentaires
Quisquose
15/09/2019 à 09:16

Si on devait juger le film en comparaison du livre, on pourrait quand même dire que c'est très mauvais.

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