Critique : Au pays du sang et du miel

Simon Riaux | 1 février 2012
Simon Riaux | 1 février 2012
L'engagement cyclique de nos amis les stars en faveur des victimes de conflits de tout poil, réfugiés et autres héritiers de la misère du monde peut légitimement agacer le spectateur sommé de culpabiliser, de prendre conscience, et bien souvent de mettre la main à la poche. Pour autant, la démarche d'Angelina Jolie a de quoi impressionner, par sa constance et la forme qu'elle revêt aujourd'hui. Au pays du sang et du miel n'est pas comme on pouvait le craindre, un tract bourré ras la gueule de prêt à penser, mais un premier film éminemment sincère. Imparfait, souvent maladroit, il n'en demeure pas moins courageux et lancinant.

Daniel et Ajila forment un couple impossible, gradé serbe et prisonnière bosniaque, dont la passion n'a d'égal que les tourments. L'intrigue pourrait évoquer le Black Book de Verhoeven, à la différence que le rôle de la résistance est ici nettement moins important que chez le Hollandais violent, et que contre toute attente, la vision de la réalisatrice s'avère bien moins romanesque et subversive, car gorgée d'une noirceur inattendue. Nos deux amants s'aiment à corps perdu, mais ne peuvent empêcher la peur et la haine de s'immiscer en eux. Un parti pris assumé jusqu'aux derniers plans de cette histoire tragique et funeste, où les bons sentiments hollywoodiens n'ont pas leur place. Alors que tout s'écroule autour des personnages, plusieurs séquences retiennent l'attention, le portrait fait d'un bourreau qui ne cache pas à l'artiste son cruel devenir, une étreinte où surgit soudain une sentence mortelle, un militaire préférant perdre un fils qu'un soldat...

Cette première réalisation d'Angelina Jolie est loin d'être parfaite, souvent répétitif, le scénario mériterait une bonne cure de minceur, et sa mise en scène, à trop vouloir en faire, alourdit plusieurs séquences essentielles, dont l'introduction. Pour autant, ces défauts sont la marque d'une évidente sincérité et la maladresse de l'ensemble va de paire avec une réelle volonté de bien faire. La cinéaste a du mal à maximiser l'impact de ses scènes les plus fortes, comme tout jeune réalisateur désireux d'inclure le plus d'éléments possibles dans une œuvre qu'il sait être potentiellement la dernière.

Sans didactisme scolaire ni bons sentiments déplacés, Angelina Jolie prend de sacrés risques en choisissant d'aborder le conflit serbo-croate aussi frontalement. Madame Pitt serait-elle meilleure réalisatrice que comédienne ?

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