Critique : Ondine

Patrick Antona | 25 août 2010
Patrick Antona | 25 août 2010

Thème on ne peut plus classique du fantastique, la romance entre être humain et sirène (ici on parle même de selkie) n'a que peu été traité au cinéma. Car en dehors de Splash ou de la bleuette Aquamarine, rares sont les films qui osent aborder un sujet glissant, d'aucuns diront qui sent le poisson ! Neil Jordan prend lui le pli de la fable sociale et du récit sur la corde raide, car dès le début est posé le dilemne : y a-t-il tromperie sur la (belle) marchandise ?

Car quand le pêcheur Syracuse (Colin Farrell, look hirsute mais au jeu en demi-teinte excellent) ramène une superbe femme  (splendide Alicja Bachleda) dans son filet un beau matin de pêche, sa fille handicapée Annie (Alison Barry) se persuade bien vite que la belle Ondine est en fait une selkie, avatar humain du phoque. Cette révélation va commencer à agiter tout l'entourage irlandais de cette "famille" ainsi bizarrement recomposée. On discerne assez vite ce qui a intéressé dans ce récit Neil Jordan, qui renoue avec un de ses sujets particuliers à savoir l'élément féminin perturbateur et révélateur d'une certaine condition sociale (Mona Lisa, L'étrangère voire The Crying Game) et la balance à respecter entre l'expression du désir amoureux et les obligations familiales. De même, pour  Colin Farrell, père d'un enfant atteint de maladie dans la réalité, qui excelle dans un rôle aux antipodes de Bienvenue à Bruges et autre Miami Vice où l'on sent revenir ses racines irlandaises et qui réussit à être un vecteur crédible d'émotion, ainsi que d'humour, ces joutes verbales avec le prêtre interprété par Stephen Rea comptant parmi le meilleur du film.

Après un première partie réussie, où la romance amoureuse et le fond mystique, font bon ménage, rythmée par les efforts d'Annie pour prouver l'origine surnaturelle d'Ondine, la seconde partie prend une tournure "réaliste" qui malheureusement évente un peu trop tôt la part de mystère qui commençait à nous envoûter. Même si l'aventure prend un côté thriller qui n'est pas désagréable, on sent comme une volonté de Neil Jordan de dépasser le cadre du trio familial qui fonctionnait pour fournir un ressort dramatique en plus. Mais cela ne gâche en rien le plaisir visuel de Ondine, car que ce soit la manière dont la caméra caresse les formes de Alicja Bachleda ou par le rendu des beaux paysages irlandais, Neil Jordan retrouve ainsi ce qui faisait son talent et son style quand il oeuvre sur des sujets qui sont de l'ordre de l'intime.

Spectacle attachant et  poétique, tout en demi-teinte, Ondine peut être perçu comme une agréable bouffée d'optimisme, chose dont le cinéma britannique est plutôt avare.

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