Le Géant de fer : Critique

Sandy Gillet | 25 novembre 2004
Sandy Gillet | 25 novembre 2004

Quand Warner se décida, vers la fin de la décennie dernière, à vouloir quelque peu disputer à Disney son hégémonie dans le domaine de l'animation, cela donna d'abord Space jam en 1996 qui, bien qu'ayant coûté la somme rondelette de 80 millions de dollars, rapporta suffisamment dans les caisses du Studio pour envisager de nouvelles expériences. Mais ni Quest for Camelot (Excalibur, l'épée magique) en 1998, pourtant honnête divertissement pour enfants, ni Iron giant en 1999 ne purent ou ne surent surfer sur ce coup d'essai financièrement réussi. Depuis, Warner s'en est retourné à ses chères études et a concentré ses efforts dans le domaine à l'attention de la petite lucarne, avec ses « toons » nouvelle génération ou encore sa remarquable série des Batman, allant jusqu'à créer sa propre chaîne de télé, déclinée dans le monde entier, pour les diffuser.

 

 

Aujourd'hui, on se dit pourtant que le Studio aurait dû persévérer dans cette voie, non seulement parce que Le Géant de fer reste plus que jamais ce petit bijou d'esthétisme enchanteur qui nous avait ravi à l'époque, mais aussi parce que de l'hégémonie Disney, il ne reste plus que des lambeaux. En effet, si Warner semble avoir essuyé les plâtres de la concurrence frontale, d'autres ont réussi peu à peu à imposer leur marque de fabrique, ou tout du moins un style prometteur. On pense tout naturellement à la Fox et son Âge de glace très réussi (la Fox faillit pourtant tout laisser tomber après le cuisant échec commercial de Titan A.E), du département animation de Dreamworks avec dorénavant la franchise Shrek, sans oublier bien entendu Pixar qui maintient sous assistance respiratoire un Disney moribond, et dont Les Indestructibles, dernier avatar en date en cette fin d'année 2004, n'est autre qu'une réalisation Brad Bird, le même qui est derrière Le Géant de fer. La boucle est donc bien bouclée !

 

 

Véritable réussite visuelle dont l'inspiration est à rechercher dans l'imagerie des comics américains des années quarante (dont le chef de file ne fut autre que Max Fleischer et son Superman, auquel le film rend expressément hommage), Le Géant de fer s'impose définitivement par la manière qu'il a de nous conter une histoire à la trame pourtant éprouvée (l'amitié entre cet enfant et ce robot venu de l'espace rappelle tout de même, allez, au hasard, E.T l'extraterrestre !), mais qui, à l'instar du film de Spielberg, laisse affleurer de cette tonalité douce amère propre à l'univers de l'enfance.
Que dire aussi devant le formidable travail de captation d'une époque schizophrène, où à l'insouciance de l'après-guerre répondait la peur panique de la menace nucléaire, sinon qu'il rend bien compte des futurs soubresauts auxquels l'Amérique devra faire face ? Par exemple, l'obsession maladive du fonctionnaire, envoyé par Washington pour faire du robot un ennemi qu'il faut détruire coûte que coûte, ne montre-t-elle pas en filigrane ce que fut le maccarthysme ?

 

 

Résumé

Bien plus profond qu'il n'y paraît, car s'enfonçant jusqu'aux racines de l'histoire iconographique de son pays et s'inscrivant à jamais dans l'imaginaire de tous, Le Géant de fer était la preuve qu'il est toujours possible d'aller à l'encontre des préceptes du genre établis par Disney (et heureusement, depuis, atomisés par Pixar) et de réaliser un film d'animation personnel, émouvant, à la poésie rare.

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