Critique : Truman Capote

Laurent Pécha | 8 mars 2007
Laurent Pécha | 8 mars 2007

Enfin ! Après 15 ans de métier et plus d'une trentaine de rôles – toujours au second plan mais jamais à cause du talent, Philip Seymour Hoffman vient de connaître la consécration suprême en remportant pour son vrai premier rôle l'oscar du meilleur acteur 2006. Une juste récompense pour un acteur qui trouve en Truman Capote le moyen d'exprimer toute l'immensité de son jeu. Car si le premier (que de premiers dites-nous !) long-métrage de fiction de Bennett Miller constitue un arrêt incontournable de cette semaine cinématographique, c'est effectivement avant tout par la prestation impeccable de Philip Seymour Hoffman.

L'acteur s'approprie le costume du célèbre romancier instantanément, alors même qu'on ne l'a pas encore vu à l'écran. Le premier tour de force de Hoffman provient de la voix nasillarde de Capote que le comédien copie à la perfection. Le film vient à peine de débuter que le charme (pour les profanes) et l'identification (les familiers de l'écrivain) sont instantanés. Dès lors, Miller peut dérouler son récit, le poids lourd Hoffman se chargera de compenser les manquements de jeunesse du cinéaste (une mise en scène parfois trop effacée) et la lourde référence au film de Richard Brooks (les scènes en commun ne tirant pas du tout dans la même catégorie). Loin d'être la biopic classique et sans saveur que pouvait laisser présager les multiples nominations aux Oscars, Truman Capote marche effectivement sur les plates-bandes de De sang-froid, en relatant l'enquête de l'écrivain sur le meurtre crapuleux d'une famille de fermiers du Kansas dans les années 1950 et sa rencontre avec les deux assassins en attente d'être exécutés. Une enquête qui amènera Capote à écrire son chef-d'œuvre, De sang-froid, que Brooks adaptera quelques années plus tard au cinéma. Mais un roman que Capote paiera cher, puisque mis à mal psychologiquement par sa rencontre avec les meurtriers, l'écrivain ne publiera plus rien d'autre jusqu'à sa mort. Les meilleurs moments de Truman Capote proviennent bien de cette capacité à nous montrer un Capote vaniteux et timide, à la fois sincère et égoïste, compatissant et indifférent, humble et insolent, qui se détruit petit à petit tout en créant une œuvre qui va influencer tout un pan de la littérature contemporaine.

Un peu à l'image d'un Amadeus qui montrait que derrière le génie de Mozart se cachait un indécrottable petit scélérat, Truman Capote nous impose la vision acerbe d'un talentueux écrivain profondément humain. Une esquisse à bien des égards bouleversante, à laquelle le meilleur acteur 2006 apporte tout son immense talent.

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