Un mail de Michael Moore

Julien Dury | 18 mai 2007
Julien Dury | 18 mai 2007

On avait récemment appris que la justice américaine en voulait à Michael Moore pour s'être autorisé une petite escapade à Cuba lors du tournage de Sicko. La veille de la projection cannoise du film, le cinéaste s'est expliqué dans un mail à sa liste de diffusion.

 

 

C’en est fini ! Mon nouveau film, Sicko est achevé et sera projeté en première mondiale ce samedi soir au Festival de Cannes. Comme pour Bowling for Columbine et Fahrenheit 9/11, nous sommes fiers d’avoir été choisis par ce prestigieux festival pour y présenter notre travail.

J’avais l’intention de garder Sicko secret et ne le montrer quasiment à personne avant sa première cannoise. C’est ce que j’ai fait et, comme vous avez pu le noter si vous recevez mes rares lettres de diffusion, je suis resté très silencieux à propos de ce que je faisais. Entre autres, parce que je travaillais très dur pour compléter le film. Mais mon silence était aussi dû au fait que je savais que l’industrie de la santé – une industrie qui produit plus de 15 % de notre PIB – n’allait pas aimer la majorité de ce qu’elle verrait dans ce film, et que je pensais qu’il valait mieux ne pas la contrarier plus tôt que nécessaire.

Eh bien, je crois qu’aller tranquillement à Cannes n’était pas au programme. Sous un prétexte étrange, le deux mai, le gouvernement Bush a entamé une action en justice contre moi quant à la manière dont j’aurais obtenu certains éléments qu’ils croient figurer dans le film. Comme aucun d’entre eux n’a vu le film (du moins, je l’espère !), ils ont décidé à l’inverse de Fahrenheit 9/11 de ne pas attendre que le film sorte et soit trop vu pour commencer leur attaque.

Le Secrétaire de Bush au Trésor, Henry Paulson a lancé une enquête sur un voyage que j’ai accompli à Cuba pour tourner des scènes du long-métrage. Ces scènes concernent un groupe de secouristes du onze septembre qui souffrent d’affections contractées lors de leur travail sur Ground Zero. Ils ont reçu peu ou prou d’aides de la part du système de santé du gouvernement. Je ne veux pas révéler ce qui se passe dans le film, car je ne veux pas vous gâcher la surprise (même si je suis sûr que vous en entendrez beaucoup parler après samedi).

De plus, nos avocats m’ont conseillé de ne pas en dire trop pour le moment, comme le film se rend dans un endroit bien plus terrifiant que Cuba. Soyez sûrs d’une chose : aucune loi n’a été enfreinte. Tout ce que j’ai fait, c’est simplement violer cette règle du journalisme contemporain qui dit « ne posez pas de questions à ceux qui sont au pouvoir ou vos privilèges de bouche seront abolis ».

Cette action préventive menée par le gouvernement Bush juste avant la première cannoise de Sicko ont conduit nos avocats à craindre pour la sécurité du film, remarquant que le Secrétaire Paulson pourrait arguer du fait que le contenu du film a été obtenu par une violation de l’embargo que notre nation fait actuellement peser sur Cuba, et les lois de voyage qui interdisent au citoyen moyen de notre pays libre de prendre l’avion pour l’île. (La loi n’interdit à personne de profiter du Premier Amendement et de défendre son droit à un journalisme libre, les documentaires étant des œuvres protégées de journalisme).

 

 


 

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