Shauna MacDonald, Saskia Mulder et Nora-Jane Noone (The Descent)

Audrey Zeppegno | 12 octobre 2007
Audrey Zeppegno | 12 octobre 2007

Alors que Dog Soldiers mettait en scène un casting majoritairement mâle, The Descent, le second opus de Neil Marshall, donne la part belle au beau sexe en propulsant six bombes anatomiques dans un milieu des plus hostile. Et lorsque le film d'épouvante injecte quelques grammes de finesse dans un monde brutes sanguinaires, cela se traduit à l'image par l'apparition mirifique d'une brochette de comédiennes aux visages d'anges, aussi différentes que talentueuses. Le temps d'une escale au Festival du film Britannique de Dinard, rencontre avec trois de ces poupées vengeresses dans un esprit bon-enfant qui tranche terriblement avec l'atmosphère du film. Soit, l'occasion de confirmer ce que le film nous laissait à voir : ces filles-là n'ont pas fini de crever l'écran.

 

Qu'est-ce qui vous a le plus attiré dans le scénario de The Descent ?

Saskia Mulder : La première chose qui m'a plu dans The Descent, c'est le fait de pouvoir travailler avec cinq autres filles. C'est très rare de trouver un scénario qui mette en scène six personnages de femmes fortes, et cela a été primordial pour moi. D'autre part, j'adore les challenges physiques que ce film impliquait. J'ai aimé le fait d'avoir à dépasser mes limites.

Nora-Jane Noone : Oui, tout l'aspect technique et sportif développé dans le film m'a également beaucoup plu. Jusque-là, j'avais joué essentiellement dans des drames (The Magdalene sisters), et The Descent m'a donné l'opportunité de camper une personnage radicalement différent de ce que j'avais pu interpréter auparavant. Et puis, je suis une grande fan de films d'horreur depuis que je suis toute petite, alors, j'ai été très excitée à l'idée de pouvoir en tourner un moi-même, d'autant plus que celui-ci avait la spécificité de mettre en scène un casting purement féminin.

   

Saskia Mulder

 

Shauna MacDonald : Et puis, mis à part l'aspect physiques du film, le scénario se focalise sur des personnages extrêmement bien construits, aux prises avec des sentiments divers très éprouvants. The Descent disposait donc à la base d'un fort potentiel dramatique, et l'interprétation de Sarah constituait déjà à elle seule un véritable challenge. D'ailleurs, ça m'a assez surprise car je ne m'imaginais pas qu'un film d'horreur puisse faire appel à une palette d'émotions aussi variées.

 

Comment vous êtes-vous préparées à vos rôles ?
Shauna MacDonald : On a toutes suivi un entraînement physique dans un camp spécialisé. On s'y est initié à l'escalade, à la spéléologie, au rafting.. Le but étant d'assimiler tous ces savoir-faire aussi rapidement que possible

Saskia Mulder : Il n'y a rien de pire, dans un film qui traite d'un sport à haut risque aussi pointu et technique que de s'apercevoir que le protagoniste n'a pas la moindre idée de quelle posture adopter ou de comment s'y prendre avec son matériel.. C'est d'ailleurs valable pour n'importe quel film, qu'il traite d'escalade ou de quoique ce soit d'autre. Si l'un des acteurs ne maîtrise pas le B.A. BA de ce genre de pratique technique, on s'en rend compte très facilement. Donc pour pallier à ça, on a toutes voulu suivre un entraînement qui nous permette simplement de savoir comment nous comporter dans ce type d'environnement, et d'être en mesure de s'y adapter et de réagir de façon quasi instinctive.

 

Shauna MacDonald

 

 

Shauna MacDonald : Bien sûr, en seulement deux semaines, on ne peut pas prétendre devenir un pro de l'escalade. On a juste fait de notre mieux pour intégrer l'essentiel de ce sport extrême.

Saskia Mulder : Oui, c'est sûr que si des grimpeurs professionnels visionnent le film, ils relèveront toujours quelques détails qui ne collent pas, un pied de travers, une mauvaise prise... Mais je pense que nous l'avons fait avant tout pour nous et pour le commun des spectateurs.

Nora-Jane Noone : Une autre phase de notre entraînement a consisté aussi à nous apprendre comment un groupe de spéléologues travaillent ensemble, et interagissent en cas de situation critique.

Shauna MacDonald :Et lorsque l'on explore un gouffre, inutile de vous dire que l'on ne se contente pas seulement de s'y promener à l'aveugle. Il faut garder tout un tas de manoeuvres en tête, et ne laisser aucun détail au hasard. …Tu es la première concernée par ça Saskia, puisque ton personnage Rebecca est censée être la plus expérimentée d'entre-nous.

 

Nora-Jane Noone

 

 

Saskia Mulder : Oui, d'ailleurs, lorsque l'on a été amené à explorer une caverne pour de vrai, chacune d'entre nous s'est instinctivement greffée sur l'état d'esprit de son personnage. Et comme mon personnage, Rebecca, fait un peu figure de mère poule au sein du groupe, prenant soin des autres filles et veillant à ce que personne ne se blesse, j'ai tout naturellement choisi de fermer la marche afin de m'assurer que l'expédition se déroule pour le mieux et qu'aucune de nous ne cède à la panique. C'est étrange comme la réalité peut dépasser la fiction parfois… Ce qu'il faut préciser aussi, c'est que cet entraînement nous a permis de mieux nous connaître, et de nous lier très rapidement. Il faut savoir que nous ne nous étions jamais vu avant, et le simple fait de partir faire de l'escalade pendant deux semaines a été un incroyable accélérateur de rapports humains.. Tentez ce genre d'aventure, et vous verrez, croyez-moi, vous vous ferez des amis en un temps record, parce que c'est tellement dangereux et effrayant parfois, qu'on en vient à se demander « Qu'est-ce que je fait là ? »… Dans ces cas-là, la réponse vient des autres.

 

 

Nora-Jane Noone : Ca me fait penser au moment où j'ai dû escalader une paroi, j'étais à deux doigts d'atteindre le sommet, et je n'en pouvais tellement plus que je leur ai crié « Je ne peux plus respirer ! », j'étais vraiment à bout de forces.

 

Saskia Mulder : Oui ! Et les autres filles qui étaient restées en bas à la regarder l'encourageaient, en lui disant : « Vas-y ! tu peux y arriver ! », avec une conviction digne de leaders d'expédition qui auraient été capables de l'assister en cas de pépin…

Nora-Jane Noone : sauf que ces leaders-là étaient en sécurité et sur la terre ferme. (Rire.)

 

Quelle a été la chose la plus difficile à vivre durant le tournage ?
Nora-Jane Noone : Pour moi, ça a été la scène où mon personnage se casse la jambe. Je gisais dans une sorte de mare qui s'étendait sur toute une partie du plateau. J'ai été amenée à barboter dans cette eau glaciale pendant une bonne douzaine d'heures, tout en récidivant le jour suivant afin de poursuivre le tournage de la séquence. Donc, j'ai dû patauger dans ce bain saumâtre pendant deux bons jours d'affilée. Et je gelais littéralement sur place. On a voulu m'apporter des couvertures pour que j'essaye de réchauffer un peu la partie de mon corps qui n'était pas immergée mais j'ai refusé, par crainte d'être encore plus frigorifiée après coup… C'était pitoyable.

Shauna MacDonald : Et bien sûr après le tournage de ce type de scènes, lorsque nos personnages s'extirpaient finalement de ces trous d'eau, nous devions rester trempées pour préserver la continuité et la cohérence du script. Lorsque nous en avions fini avec la case maquillage, en guise de touche finale, on nous aspergeait donc d'eau glacée de la tête aux pieds.

Saskia Mulder : Ce qui est drôle, c'est qu'aucune des filles n'était du genre à se plaindre parce qu'elle s'était cassée un ongle ou à cause d'un autre bobo du même acabit, mais il arrive un moment où on est tellement frigorifiée. Et tellement épuisée. Enfin je parle pour moi, mais il y a eu des moments où je priais intérieurement pour ne pas mourir de froid dans ce trou !

Nora-Jane Noone : Moi aussi, j'implorais : « Pitié ! ne me faites pas ça ! »

Shauna MacDonald : Et moi, un jour où je n'en pouvais plus, je leur ai dit : « Basta ! Je suis trempée jusqu'aux os, et ça fait trois jours que je dégouline ! » (Rire.)

 

 

Saskia Mulder : C'est très étrange, parce qu'au début de la promotion, lorsque ces questions concernant les conditions de tournage nous étaient posées, nous répondions « Oh oui, il faisait froid mais bon.. Vous savez, nous avons vécu une si bonne expérience ensemble que peu importe.. ». Et nous voilà aujourd'hui en train de nous appesantir avec un peu plus de franc-parler sur les difficultés rencontrées. C'est comme lorsque les femmes évoquent entre elles leurs accouchements, et qu'elles éludent toute la douleur ressentie sur le moment, parce que rien n'a plus d'importance sinon l'enfant adorable qu'elles viennent de mettre au monde.

 

(Petit spoiler si on ne connaît rien de l'histoire du film.) Votre réalisateur, Neil Marshall, a refusé de vous montrer à quoi ressemblaient les Crawlers (Les monstres du film, Ndlr.). Il vous les a donc caché jusqu'au moment où vous deviez les voir pour la première fois dans le film. Quelle a été votre première réaction ?
Shauna MacDonald : Il a alimenté un énorme suspense autour des créatures. Pendant longtemps, on n'a pas su à quoi s'attendre. Alors, on a chapardé des photographies qui traînaient dans le département maquillage, ce qui nous a donné une vague idée de leur apparence. Mon personnage est la première à les entr'apercevoir dans le film, donc j'avais un métro d'avance par rapport aux autres filles, et j'en rajoutais sur l'effet de surprise tant attendu. Pour les stresser un peu, je les charriais sur le mode « votre heure arrive bientôt… », sans pour autant leur révéler quoique ce soit sur eux.

 

 

Nora-Jane Noone : Une partie du plateau nous était interdit d'accès, ils y tournaient des prises avec les Crawlers et tout le périmètre était quadrillé pour nous empêcher de les voir avant l'instant T.

Saskia Mulder : Le plus drôle, c'est que lorsque Neil nous annoncé que le moment fatidique était arrivé, que nous allions être face-à-face aux Crawlers, c'était le matin même du tournage, il nous a dit « Ok les filles, vous pouvez réagir comme vous voulez, laissez vos personnages vivre ça comme vous le sentez, mais quoique vous fassiez, restez cool… » Et sûres de nous, on lui a répondu, « D'accord, ne t'inquiète pas, on fera comme tu veux.. » Donc, arrive la scène où l'on se retourne et où l'on tombe nez à nez avec eux, et là, en l'espace d'une seconde, le studio s'est littéralement vidé. Nous avons eu tellement peur, que nous nous sommes toutes enfuies du plateau, en hurlant de trouille. C'était terrifiant !

Nora-Jane Noone : Oui, mais il faut dire pour notre défense que le suspense alimenté par Neil a été pour beaucoup dans notre réaction. Il a généré une tension qui a tout amplifié.

 

(Attention gros spoiler sur la question et la réponse, à lire uniquement après avoir vu le film.) Concernant la fin du film, une frange importante du public comprendra que vous, Shauna, ne parvenez pas réellement à sortir de la grotte, et que la séquence où l'on vous voit remonter à la surface est un fantasme. Vous faites une chute, vous perdez connaissance et vous vous imaginez la scène. Pourtant, on peut avoir une toute autre interprétation : vous arrivez effectivement à vous en sortir, et le moment où vous apercevez votre fille dans le gouffre n'est qu'un énième flash voué à insister sur le fait qu'après toute l'horreur que vous avez vécu lors de cette grotte, le plus dur à surmonter pour votre personnage reste la perte de son enfant... Qu'en pensez-vous ?
Shauna MacDonald : Je pense qu'elle trouve la mort dans cette grotte. Selon moi, il ne s'agit pas d'une hallucination. Mais vous avez raison concernant l'évènement le plus dur qu'elle ait jamais eu à affronter. La pire des choses n'est pas ce qui s'est passé pendant cette exploration, mais bien la mort de son mari et de sa fille. D'ailleurs, au moment où mon personnage reste coincé dans un tunnel, et que la panique la gagne, pour la rassurer, son amie lui dit que rien ne peut lui arriver de pire que ce qu'elle a déjà surmonté. Et je suis d'accord avec ça. Mais voilà, les gens voient les choses différemment et pas mal d'entre eux sont restés assez perplexes face au dénouement de The Descent. Ils pensent qu'on a tourné une version, et que par la suite, on a tenté de clarifier les choses. Mais tout ça est tellement ambigu et subjectif. Chacun doit se faire sa propre idée. En ce qui me concerne, j'ai joué cette scène finale en me disant qu'elle croyait s'en être sortie, ou plus justement, qu'en s'imaginant avoir retrouvé sa fille, elle avait trouvé une sorte de paix intérieure. Ce qui revient à dire qu'à cet instant-là, même si elle est encore en vie, son esprit lui est bel et bien mort.

 

 

Avez-vous d'autres projets de films en prévision ?
Saskia Mulder : J'ai un rôle dans Belhorizon, une production franco-belge qui sortira l'an prochain en France. C'est un premier film signé Inès Rabadan.
Nora-Jane Noone : Je ne suis encore sûre de rien. Donc motus et bouche cousue, en attendant la confirmation.

 

Dernière question, quel est votre film d'horreur préféré ?
Saskia Mulder : Moi, si j'avais à choisir, je dirais qu'il s'agit de Shining.

Nora-Jane Noone : Ca c'est une colle ! Je vais devoir vous donner mon top five.

Shauna MacDonald : Celui qui m'a vraiment glacé le sang, c'est la version originale de Ring. En fait, ça tient en grande partie à mon petit ami de l'époque qui, après avoir l'avoir vu, m'a passé un coup de film et m'a dit : « C'est un bon film, nous sommes donc voués à mourir ! ».

Saskia Mulder : Ce qui explique la raison pour laquelle tu as rompu ?

Shauna MacDonald : Ce n'est pas ce qui a le plus pesé dans ma décision, quoique, maintenant qui j'y pense, c'est vrai que nous ne sommes pas restés très longtemps ensemble après cet épisode. (Rire.)

 


     

  

Nora-Jane Noone : Je suis d'accord avec toi concernant le premier Ring, il est bien meilleur que la deuxième version, et j'y ajouterais Les Innocents (lire la critique du DVD zone 1 ici), Shining, et Candyman.

Saskia Mulder : Candyman ! C'est l'exemple type du film pour ados !

Nora-Jane Noone : Ca l'est, mais j'étais très jeune quand je l'ai vu, et je me souviens que par la suite, j'avais pris l'habitude de me planter devant le miroir, en appelant Candyman, Candyman, Candyman.

Saskia Mulder : J'ai eu tellement peur lorsque j'ai vu Candyman ! Ce genre de films m'a un peu traumatisée pour tout dire, j'avais une telle trouille que je les regardais les yeux à moitié fermés.

 

Propos recueillis par Audrey Zeppegno.
Autoportraits des comédiennes.
Remerciements à l'équipe du Public Système et en particulier à Céline Petit.

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