Michael Cimino - Master class La Porte du Paradis

Laurent Pécha | 13 juillet 2005
Laurent Pécha | 13 juillet 2005

Michael Cimino
Veuillez m'excuser j'ai perdu ma voix. Mais je suis très excité de voir ce qu'ils ont fait parce que personne ne m'a dit que c'est une version restaurée de La porte du paradis qui sera projetée ce soir. C'est une grande surprise pour moi. Vous verrez cette nouvelle version avant moi, j'espère que le son sera bien pour vous, que la copie soit bonne et plus tard vous pourrez me dire ce que vous en pensez. Je n'arrive pas à croire que tant de personnes viennent voir un film qui a été fait il y a très longtemps. Pour moi c'est comme si nous l'avions fait hier. Je ne suis pas un maître, je suis un élève comme beaucoup d'entre vous et j'ai oublié tout ce que j'ai appris. Aujourd'hui je réalise tout ce qu'il me reste encore à apprendre. Alors s'il vous plait, nous somme tous du même monde. Je suis simplement à une place différente. Mais nous cherchons tous la même chose, même ceux qui sont assis au balcon.

Michel Ciment : Je crois que j'ai lu ou entendu quelque part qu'avant de commencer à faire des films, vous rêviez de faire une comédie musicale à Hollywood. Est ce que la première séquence de danse de La Porte du paradis réalise votre rêve ?
J'adore la musique et la danse, pour moi être sur un plateau avec des danseurs, de la musique et une caméra qui tourne autour, c'est un véritable bonheur. John Ford disait que les trois sujets à filmer pour faire un bon film étaient : un cheval au galop, une grande montagne et un couple qui danse. Et je suis tout à fait d'accord avec ça. Vous retrouverez ces trois éléments dans le film. J'espère seulement que John Ford regardera aussi le film ce soir et qu'il donnera sa bénédiction.

Vous avez commencé par étudier l'art à Yale, comment cela a t'il influencé votre travail par la suite ?
Je n'en ai aucune idée, comment je suis devenu réalisateur a toujours été un mystère pour moi. C'est le pire des jobs parce que sur un plateau l'on travail 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 et si en plus, vous écrivez le scénario, cela prend deux ans de plus. Le réalisateur travaille plus que les autres. Les acteurs viennent pour quatre semaines de répétitions et six semaines de tournages avant de partir sur un autre plateau. Et vous restez tout seul avec votre pellicule et vous passez une autre année à monter le film. J'ai une formation de peintre et de designer, je n'avais aucune intention de faire de films. Les grands peintres me passionnaient et m'ont influencé, les grands architectes aussi. C'étaient mes héros. Je n'ai pas grandi en voyant des films tous les jours, comme de nombreux cinéastes d'aujourd'hui. Pour moi, cela a été une transition inhabituelle, étrange et mystérieuse.
La meilleure façon pour moi de vous l'expliquer est de prendre cet écran blanc derrière nous qui est une surface bidimensionnelle, comme un tableau. Et on regarde un tableau comme on regarde un écran. Pour faire l'expérience de l'architecture, il faut se déplacer dans l'espace pour voir les jeux de lumière et d'ombres, l'essence de l'architecture est dans le mouvement dans un lieu. On aime la beauté d'un tableau en deux dimensions mais on sait que la compréhension véritable d'un espace ne peut être saisi que si l'on bouge à l'intérieur.
Mon ennemi est devenu cet espace bidimensionnel. Ce que je voulais en faisant du cinéma, c'était d'aller au-delà du mur, de le détruire, de vous prendre par les yeux et vous emmener au-delà du mur pour vous faire oublier ces deux dimensions et vous immerger. Dans le film Sunchaser, il y a une réplique d'un gangster métisse en prison : « que la beauté soit devant moi, que la beauté soit derrière moi, qu'elle soit à côté de moi, qu'elle soit au dessus de ma tête, qu'elle soit sous mes pieds et que la beauté soit tout autour de moi ». Ceci exprime mieux que je ne le peux l'idée que je me fais du cinéma.

Je suppose que beaucoup d'entre vous ont déjà vu un spectacle de ballet. Sur la scène, il y a ce joli tableau de danse, de couleurs, de mouvements faits sans aucun effort. Même si c'est un ballet et que c'est très beau, la vision reste bidimensionnelle. Mais si vous bougez de 90° sur un côté et que vous regardez depuis ce nouvel angle, l'expérience change radicalement. Soudain on voit l'effort physique de la danse, on comprend à quel point c'est athlétique, on entend le souffle des danseurs et les bruits des pas, c'est comme des chevaux qui suent, qui soufflent. Si on se replace à l'avant, le spectacle est à nouveau très beau, sans effort. Je ne peux vous l'expliquer mieux que cela.

Parlons des compositions picturales, il semble que vous appréciez particulièrement le ratio 2.35 cinémascope.
J'aime le grand écran, l'Ouest de l'Amérique regorge de grands espaces et ils exigent presque un écran large. Si l'on diminue le ratio, on se limite. C'est pour cela qu'un film vu à la télévision est un film différent.


Vous avez aussi eu une formation d'acteur. Vous avez étudié avec Lee Strasberg de l'Actor's Studio, nous avons la chance d'avoir Isabelle Huppert ici, qui a travaillé avec vous. Qu'avez-vous appris de Strasberg, comment cela a influencé votre manière de travailler avec les acteurs dans votre future carrière de réalisateur ?
Je pense que j'ai suivi cette formation à cause de ma naïveté et mon manque de connaissance par rapport au cinéma. Je ne connaissais rien sur l'art de diriger les acteurs. À cette époque là je n'arrivais même pas à rentrer sur un plateau de cinéma. Mais je savais que si je devais travailler avec des acteurs, je devais apprendre comment eux fonctionnaient. La meilleure manière de comprendre était donc d'étudier moi aussi l'art d'être acteur. Je suis allé à l'Actor's Studio une fois par semaine, j'ai pris des cours privés, j'ai répété le soir comme tous les autres acteurs, j'ai étudié la danse et j'ai fait tout ce que j'ai pu pour apprendre quelque chose. Parce que si vous demandez à un acteur de faire quelque chose en l'obligeant de surcroît à changer sa façon de le faire, vous devez savoir comment demander au mieux l'ajustement. Un acteur ne peut faire confiance à un réalisateur s'il n'a pas la même vision du film, ils doivent croire que ce vous voyez est vrai, réel, honnête, droit et que lorsque vous demandez un changement, c'est pour le mieux. C'est une confiance qu'ils doivent avoir dès la première lecture du script.

La mise en scène ce n'est pas une dictature pour moi. C'est comme être un entraîneur d'une équipe, il faut pousser les joueurs à faire ce qu'ils n'ont jamais fait auparavant, d'être meilleur que ce qu'ils ont été. La chose la plus importante est d'inspirer les acteurs et l'équipe entière. Si elle est en confiance, les acteurs sentiront leur énergie parce que l'équipe est très sensible et ressent tout. Elle sait quand le réalisateur est faible, indécis, quand il a peur ou quand il contrôle son film. C'est comme un organisme vivant qui réagit immédiatement. Quand vous montrez que vous êtes confiant ou quand vous affirmez une idée claire, vous avez la possibilité (jamais de certitudes) alors d'obtenir un moment transcendant. C'est ce que l'on veut toujours et pas seulement dans un film, un moment où l'on se dépasse, où nos pieds quittent le sol, où les heures paraissent des minutes, des minutes des secondes. C'est pour cela que l'on continue de faire des films, pour essayer de retrouver cette sensation.
On sait que la perfection existe, on sait aussi que l'on n'y arrivera jamais, la perfection est pour Dieu et pas pour nous. On sait que la chose la plus importante c'est d'essayer d'atteindre cette perfection. C'est très important de garder le cœur vivant. Isabelle Huppert était parfaite.

Isabelle Huppert, on sait que chaque metteur en scène a une façon différente de travailler avec les comédiens. Tu ne travaillais en France que depuis une petite dizaine d'années, comment as-tu vécu cette expérience sur une énorme production américaine, comme La Porte du paradis et en particulier avec Michael Cimino ?
D'abord Michael a dit que les acteurs répétaient 4 semaines puis tournaient 5 ou 6 semaines, il faut savoir que le tournage La Porte du paradis a duré 7 mois, pour le plaisir de chacun.
[Michael Cimino : vous pouvez le croire ça ? non elle exagère]
C'était une aventure exceptionnelle par sa longueur déjà (sans ironie) et j'ai revu le film avant-hier. Je me suis dit la même chose que lorsque je l'avais vu la première fois. C'est vrai que dans un film comme cela, lié à des composantes que sont intrinsèquement et essentiellement la culture américaine, à savoir comme le dit Michael, le sens de l'espace, la lumière, ce sont des choses que l'on ne trouve pas en Europe. Elles influent directement sur la manière dont on voit une actrice ou un acteur évoluer dans cet espace et cette lumière donnés qui appartiennent à l'Amérique, qui sont l'Amérique et par qui le cinéma américain est fondé. Dès lors que l'on se trouve dans cet environnement, on est différent, indépendamment même du regard que Michael pouvait avoir sur moi et sur mon personnage.

Il y a quelque chose de solaire, il y a une énergie que je n'aurai pas trouvée en Europe. Ce qui est intéressant dans Les portes du paradis, ce sont toutes ces composantes positives qui sont le contraire de l'ambiguïté, du clair/obscur, toutes ces choses que l'on retrouve plus dans un film européen ou français, en même temps elles sont au service dans ce film d'une incroyable ambiguïté dans les relations entre les personnages, une espèce de flou, quelque chose qui n'est jamais nommée. C'est la combinaison des deux qui est tout à fait passionnant ici. Le film renferme un secret et c'est très rare dans le cinéma américain où ces choses là sont dites avec brillance certes mais elles sont juste dites. La grande beauté de La Porte du paradis c'est ce secret sur lequel le film nous laisse. Michael disait qu'on demandait aux acteurs des choses qu'ils n'ont jamais fait. En l'occurrence c'est vrai, moi ce que j'ai fait dans ce film, il y a peu de chances pour que je le refasse ailleurs et surtout pas dans un film français. Il y a des situations qui n'appartiennent qu'à ce genre de film.

Michael Cimino
Quand on demande à une grande actrice de faire quelque chose d'impossible, elle le fait.

Isabelle Huppert
Mais c'est très très dur de refuser quelque chose à Michael (rire généralisé dans la salle). Je ne le referai jamais, je ne sais pas comment j'ai fais. J'ai peur des chevaux, je n'aime pas cela, je ne sais pas très bien danser, je ne sais rien faire de ce que je fais dans le film.

Michael Cimino
C'est très simple, il suffit de trouver la meilleure actrice possible et vous lui demandez de faire quelque chose d'impossible. Au sujet d'Isabelle, je voudrais dire que je suis allée vers elle grâce à mon intuition, je l'ai choisie vraiment sur un coup de cœur, ce n'était pas intellectuel, c'était intuitif, je ne savais pas qui elle était. Je n'avais vu aucun de ses films mis à part dix minutes de La dentellière. J'ai rencontré quelqu'un qui n'est pas seulement une bonne actrice, mais aussi quelqu'un de très intelligent, je crois que c'est un génie.

Isabelle Huppert
J'ai toujours cru que tu m'avais vu dans Violette Nozière.

Michael Cimino
Je n'ai pas vu le film. En fait, je faisais une pause durant le casting car ma tête allait exploser à force de voir tant de comédiennes, nous étions à New York avec Joan Carelli (productrice de La Porte du paradis, Ndlr). Toutes les comédiennes du monde voulaient jouer ce rôle, la pression était trop grande. J'ai dit à Joan que j'allais me promener dehors. Je me suis retrouvé au croisement de Madison Avenue et de la 59e rue, où il y avait un petit cinéma. J'ai vu ce nom d'Isabelle Huppert sur l'affiche et je suis entré. Je me suis assis juste pour essayer de me détendre. Et là, elle est apparue à l'écran et ce fut le coup de foudre.

Dès ses premiers moments sur le plateau, elle avait amené un sac de livres et elle lisait tout le temps. Cela n'arrivait jamais avec les actrices, elles ne lisent jamais, même dans un scénario elles ne lisent que leurs répliques. Isabelle me conseillait en livres et je me disais que c'était incroyable. Je lui ai demandé de faire des choses bizarres, avant le film comme elle jouait une prostituée, je lui ai demandé de vivre dans un bordel pendant quelques jours, dans une petite ville où l'on travaillait. C'était le seul endroit dans l'État de l'Idaho où la prostitution était légalisée. J'ai passé un contrat avec Lee, la « meilleure dame » de la ville en lui expliquant que je voulais qu'Isabelle et les autres actrices fassent l'expérience de l'ennuie de leur vie entièrement consacrée à l'attente. La vie d'une prostituée dans l'Ouest ne se limite pas à danser sur une estrade dans une belle robe.
Ce bordel est ce que l'on appelle une « place fermée », les filles devaient y rester un mois, coupées du monde, ensuite elles pouvaient sortir en groupe pour faire des courses. Les actrices du film étaient toutes assez nerveuses à leur arrivée, la première chose que Lee leur a dit est : « pas d'alcool, pas de drogues, pas de petits amis » et que si l'une d'elles était choisie par un client dans le couloir après la sonnerie, elles devaient aller avec lui. Isabelle a accepté cette proposition. Je ne sais pas si c'était Lee et ses prostituées qui étaient le plus excitées ou si c'était Isabelle et les autres actrices. Combien de fois une femme, actrice ou non, sait à quoi ressemble la vie d'une prostituée ? Comme j'étais un directeur naïf à l'époque, qui ne savait rien et à qui personne n'avait dit si cela se faisait ou non, je l'ai fait. Je ne savais pas que c'était incroyable, pour moi cela semblait logique.

L'écriture de scénarii a été votre premier travail dans le cinéma. Comment voyez vous cela : est ce que vous pensez qu'écriture et réalisation sont intimement liées ou, comme de nombreux réalisateurs le pensent, que l'écriture de scénarii n'est qu'une plate-forme ?
Vous savez que vous me posez une question dangereuse. Le diable me tente avec cette question, Michel sait mieux que quiconque que si j'essaie vraiment de répondre à cette question, juste pour y apporter une réponse aussi complète que sa question, nous sommes là jusqu'à minuit. Je pense que les personnes au balcon ont hâte de voir le film et si je réponds ils ne verront jamais le film. On peut passer une heure et demie à parler de l'écriture de scénarii.

Vous pouvez nous parler du tournage de la première séquence, comment avez-vous préparé le montage ?
Cela a demandé beaucoup de préparation et de travail dans l'exécution et dans le montage. C'était une séquence très difficile à filmer mais cela a aussi été un grand bonheur. Le montage est un moment très amusant dans la préparation d'un film. J'ai choisi ce morceau de musique, Le Danube bleu, pour plusieurs raisons. D'abord, elle était la première musique, dans les années 1870, à être qualifiée de sexy, la première où les danseurs pouvaient se toucher. Avant les danses étaient très militaires. C'était donc une danse révolutionnaire à l'époque et je la trouvais très appropriée à ce moment de l'histoire des États-Unis, car la guerre de sécession venait de se finir. Tout changeait dans le pays tout autant que Le Danube bleu était révolutionnaire. Elle était considérée comme une danse diabolique. La version dans le film est jouée par l'Orchestre Philharmonique de New York mais avec un tempo très rapide sur lequel on ne peut pas danser. Mais j'aimais cette rapidité, la séquence a été filmée en Angleterre avec des danseurs professionnels et ils n'arrivaient pas à suivre le tempo avec les costumes d'époque et l'herbe. Au bout d'une minute et demie, ils étaient à bout de souffle. Cette séquence dure exactement trois minutes et elle est divisée en deux parties d'une minute et demie et je l'ai filmé avec six caméras. Si je n'en avais eu qu'une, j'aurai tué les danseurs, ils seraient morts devant mes yeux.


Ensuite, on a planifié des cercles autour de l'arbre parce que la danse à Harvard se faisait autour d'un arbre. Autour de lui, il y avait un énorme cercle de fleurs, les nouveaux diplômés dansaient autour et à la fin de la cérémonie, les garçons se battaient pour attraper le premier bouquet. L'arbre et l'endroit choisi appelaient des mouvements circulaires. Les cercles tournaient dans des sens contraires. Quand les caméras filment ce genre de mouvement, l'impression de rapidité est très grande. Il y a une grande énergie, c'est ce que je voulais et c'est ce que l'on a obtenu.

Comment avez-vous choisi les acteurs masculins principaux ?
Au moment de choisir le rôle de Christopher Walken pour Voyage au bout de l'enfer, on a vu un millier d'acteurs à New York, et j'ai encore eu très mal à la tête. Joan Carelli m'a fait passer un bout de papier avec écrit « Chris est Nick ». Je ne l'ai pas lu tout de suite, je l'avais glissé dans ma poche. A la fin de la journée, j'avais une double migraine, c'était très dur. Je disais à Joan « qui va jouer le rôle de Nick avec Robert de Niro ? » elle m'a dit d'ouvrir le morceau de papier et j'ai lu. C'était son premier film et j'ai dis ok. Si cela ne s'était pas fait, Chris n'aurait pas été dans La Porte du paradis. C'était presque aussi étrange que le casting pour Isabelle Huppert. Il n'y a pas de sciences pour un casting, cela doit venir du cœur, votre intuition, et une substance mystérieuse dans l'air.

Comment le fabuleux acteur Joseph Cotten de Citizen Kane s'est-il retrouvé au générique de La Porte du paradis et comment avez-vous fait pour filmer aussi bien les scènes de roulette russe dans Voyage au bout de l'enfer ?
Je l'ai « casté » parce que j'avais adoré sa façon de jouer dans Citizen Kane et encore plus dans La Splendeur des Amberson. J'étais un grand admirateur de son jeu. J'ai donc demandé s'il était encore en vie et où est ce qu'il était. Je suis allé le voir à Los Angeles, j'ai dîné avec lui et je lui ai demandé s'il acceptait de jouer dans le film et il a dit oui. Aucun autre acteur n'a été pris en considération. C'est aussi simple.
Pour Voyage au bout de l'enfer, dans les camps de prisonniers, on a simplement filmé la réalité. Toutes les claques et les coups sont vrais. Cela a été très dur. À part les personnages principaux qui étaient interprétés par des acteurs, les figurants étaient des gens de la rue, certains aux États-Unis, d'autres en Thaïlande. Ils étaient très bons pour frapper les acteurs, ils les frappaient assez forts. Je me souviens avoir vu des larmes dans les yeux de Christopher Walken, ses joues étaient très rouges. Mais en Thaïlande, le visage est sacré donc il ne faut jamais le frapper. Donc, à chaque fois que l'un d'eux tapait sur le visage d'un des acteurs, il faisait une prière. À chaque coup que vous voyiez, il y avait une prière. Des prières et de la violence.

Pouvez-vous nous parler des différentes versions de La Porte du paradis, et si la version que nous allons voir ce soir est la Director's cut ou une des autres versions. (NDLR/ on parle ici de la version qui sort en salles ce mercredi 13 juillet 2005)
Il y a eu plusieurs versions, toutes horribles. Ce soir c'est la version originale que vous allez voir. 25 ans après que le film ait été fait, il est surprenant d'être à Paris pour la voir. C'est difficile à croire. Nous étions des enfants quand nous l'avions fait. Nous étions dans ce magnifique jardin du Montana, nous étions les vrais enfants du paradis.

Vos films donnent une vision crue de la société américaine et de ses fondements historiques. Je trouve que cela se rapproche du travail de Sam Peckinpah, que pensez vous de son travail ? Pourquoi ne pas avoir retravaillé avec Clint Eastwood ?
Sam et Clint, ils auraient du travaillé ensemble. Je vais vous raconter une anecdote. Quand nous étions dans l'Idaho, en plein tournage de scènes de rues, qui imaginez vous qui débarque au milieu des centaines figurants, de la locomotive, des chevaux, des armes à feu ? (des noms fusent dans la salle, Ndlr). Oui Sam Peckinpah. Il était là, dans toute sa gloire, simplement lui. Il était blanc comme un linge, il revenait de l'hôpital où on lui avait mis un pace maker, il avait l'air d'un mort vivant. Il m'a dit « Michael, donne moi une caméra », je lui ai dis qu'il devait être à l'hôpital, je lui ai dis que je ne pouvais lui donner une caméra mais je lui ai laissé mon pick-up et mon chauffeur. À l'arrière, il y avait beaucoup de bouteilles de grands vins, de bières, toutes sortes de boissons. Sam s'est cru au paradis, il a passé trois jours avec mon camion au bordel avant de rentrer chez lui. Quand j'ai retrouvé mon pick-up, j'ai voulu boire un verre de vin, mais mon chauffeur m'a dit qu'il ne restait rien alors qu'il y avait de quoi boire pendant six mois.

Propos recueillis et retranscrits par Shamia Amirali.

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