Prototype 2

Aude Boutillon | 8 juin 2012
Aude Boutillon | 8 juin 2012

Quelques jours avant la sortie en rayons de Prototype 2, Activision dévoilait un trailer filmé en live action, rythmé par le timbre déchirant de Johnny Cash, et saisissant d'émotion. Un choix artistique étonnant pour un titre faisant suite à un premier opus un rien régressif, et essentiellement porté par son argument de jeu-défouloir. Prototype 2 poursuivra cette veine, en élargissant son terrain et en s'affranchissant au passage de contraintes inhérentes au gameplay.... et au scénario, ayant pour effet d'aboutir à un jeu plaisant, mais relativement simpliste et convenu.

 

 

L'afficionados de Prototype, premier du nom, se trouvera en terrain connu : la ville de New-York, désormais rebaptisée New-York Zero, est en proie au même virus dévorant, contenu comme faire se peut par la milice de Blackwatch, et usitée par les scientifiques peu scrupuleux de Gentek. Il ne sera pourtant nullement question cette fois d'incarner Alex Mercer, qui de justicier de fortune se voit relégué à un statut d'ordure plus ou moins explicité, mais James Heller, soldat meurtri par la mort de sa femme et de sa fille, dont il tient ledit Mercer pour responsable. Sans que l'on ne comprenne tout-à-fait ses motivations, ce dernier infecte notre héros d'ébène et de testostérone, contraint dès lors de s'allier à son créateur pour faire imploser le système, mené de main de fer par scientifiques et mercenaires.

On l'aura compris, le jeu de Radical Entertainment ne s'illustrera pas par son scénario, qui peinera à susciter la surprise comme l'intérêt, la faute à des rebondissements identifiables à des kilomètres et des personnages peu consistants, et bien trop nombreux pour que le joueur ne prenne la peine de les identifier. Les premières cinématiques laissaient pourtant présager d'une certaine émotion, au travers de séquences stylisées en noir et blanc, tâchées de rouge sang. Celles-ci s'avèrent toutefois bien trop nombreuses, de même que confuses et répétitives, et l'on aura tôt fait de les passer au profit de l'action à proprement parler.

 


 

Les tâches diverses justifiant la progression de la trame peinent à rompre une monotonie lénifiante au possible. Au terme d'un même schéma, Heller se verra demander d'assimiler scientifiques et militaires, plus ou moins directement attachés à la propagation du virus Mercer et détenteurs d'un badge d'accès, avant d'être sommé de commettre un massacre dans une base scientifique ou militaire quelconque, puis de foutre le camp au plus vite. Nulle inventivité ou renouveau en somme, les missions consistant systématiquement en des tâches similaires, à l'exception de rares propositions plus originales, comme la défense de la ville à bord d'un hélico. Les quêtes annexes, quant à elles, ne susciteront pas davantage d'intérêt, puisqu'elles consisteront à parcourir l'environnement à la recherche de boîtes noires (recelant des informations une fois de plus dispensables) et à dézinguer des équipes d'élite (à l'efficacité toute relative). Ces tâches finiront d'enterrer la pertinence de l'IA, faiblarde au possible ; si le jeu avait à cœur de proposer un aspect d'infiltration, en ne permettant l'attaque que lorsque la cible est hors de portée de vue, le challenge se trouve purement éradiqué par la facilité déconcertante de l'entreprise. Il suffira en effet de bousculer vaguement le témoin pour détourner son regard et assimiler sa proie. Impossible, en outre, de mener à terme son action si la cible est surveillée, sauf à insister en reproduisant la manipulation ; envolées, la menace de mise à nu et le risque de se voir repropulsé en début de mission. Une jauge de suspicion vient par ailleurs rythmer la progression de Heller dans les rues de New-York Zero, mais ne la menacera à aucun moment. Il faudra réellement pousser les soldats à bout avant de déclencher une alerte ou de se voir coursé par une équipe armée jusqu'aux dents ; le mercenaire ne cillera pas plus que ça à la vue de votre personnage escaladant les murs à la verticale, ou atterrissant comme une fleur après un saut de 30 mètres. Pas plus de réactions du côté des hélicoptères, quand vous les dépasserez en planant entre deux gratte-ciels.

Prototype 2 n'en reste pas moins un jeu plaisant, ne serait-ce que pour sa prise en main intuitive et son gameplay facile, voire simpliste. On ne boudera pas son plaisir face à la déconcertante fluidité de la course folle de notre infecté, qui bondit, évite les obstacles, gravit les immeubles et saute de toit en toit sans l'ombre d'une hésitation, ni le risque de se vautrer. Les systèmes de combat élaborés à la beat'em all sont quant à eux clairement à oublier, la répétition épileptique d'un même coup suffisant d'un bout à l'autre du jeu à mettre l'ennemi à terre. Dommage, quand la progression au fil de l'aventure et des missions offre, à grands coups d'XP, des améliorations tendant aux capacités de Heller. On acquerra ainsi de nouveaux pouvoirs (tentacules, marteau, bouclier), qui, s'ils permettent de varier l'action, ne sont jamais réellement mis à profit, la tactique n'étant pas le point fort du jeu. Les combats et orgies monstrueuses relèvent alors rarement du challenge, y compris dans les repaires, ces caves regroupant une cohorte d'ennemis à abattre, contaminés et milice confondus. La mise à mort consistera alors en un sombre foutoir, peu lisible et saccadé.

 


 

Les graphismes de Prototype 2 se montrent légèrement supérieurs à ceux de son prédécesseur, mais ne parviennent pas à constituer une facture visuelle réellement satisfaisante, qui sans être totalement honteuse, se révèle un poil en-deçà des productions actuelles. Le joueur devra ainsi s'accoutumer d'un aliasing incessant, de textures très moyennes, mais surtout d'une profondeur de champ laissant franchement à désirer. On ne pourra qu'être déçu, face à la possibilité d'escalader, par exemple, l'Empire State Building, des vilaines couches grisâtres constituant l'horizon. Les modélisations échappent toutefois au désastre, en se montrant la plupart du temps assez convaincantes, et bénéficiant de doublages satisfaisants (l'on devra une fois de plus se passer de la possibilité de jouer en VO).

 

Il faudra compter une quinzaine d'heures pour venir à bout de l'aventure agrémentée de ses missions annexes, que le choix d'une difficulté plus élevée ne parviendra pas à corser. Gangréné par sa répétitivité, Prototype 2 ne sera pas de ces titres que l'on recommencera à l'envi, mais proposera tout de même une expérience de jeu relativement sympathique dans le genre bourrine et décérébrée, bien que très vite oubliable.

 

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