Conférence de presse Steven Spielberg

Simon Riaux | 10 février 2012
Simon Riaux | 10 février 2012
Deux rencontres avec Steven Spielberg en moins de 24 heures, c'est un peu notre définition de la félicité. C'est donc avec la bonhommie d'un colon anglais chassant le dragon aux confins du common wealth que nous prîmes place pour la conférence de presse de Cheval de Guerre. Avec pour hôte un metteur en scène rayonnant, d'une accessibilité et d'une gentillesse désarmantes. La salle conquise ne se fit pas prier pour le solliciter de questions bredouillées dans une émotion palpable.

Émotion exacerbée par la toute proche projection de Cheval de guerre, merveilleux récit initiatique sur fond de conflit mondial, qui ne cède jamais au spectaculaire sa recette d'une mise en scène aussi maîtrisée qu'impressionnante. « Mon utilisation de l'espace et des plans larges ne provenait pas à proprement parler d'une réflexion sur la narration. Je voulais que le public ait une chance de ressentir ce qui se passe à l'écran. Quand le montage se fait trop rapide, qu'il devient frénétique comme dans la plupart des blockbusters aujourd'hui, votre cœur s'affole, il bat la chamade, et c'est le cut intempestif qui créée l'émotion, plutôt que l'action. Je voulais que les spectateurs ressentent l'instant. »

 


Une maestria qui saute aux yeux, notamment lors d'un plan séquence ahurissant, alors que le cheval du titre s'élance à travers les tranchées, et dont nous étions curieux de savoir comment il avait été réalisé. « Il n'y a que trois plans numériques dans le film, et cette séquence n'en fait pas partie. Joey (le cheval donc) courait à la suite de son dresseur, il reproduisait son parcours, et il en était ravi, c'est un jeu qui lui a beaucoup plu. Pour arriver à ce résultat, qui est impossible avec un cheval normal, cela a pris du temps, il a fallu installer une véritable confiance avec lui, avec moi, avec le dresseur, avec toute l'équipe. »

Nombreux furent ceux qui s'interrogèrent sur la candeur de Spielberg, dont le film rappelle sans cesse combien son héros chevalin est capable d'abattre les antagonismes, pour révéler l'humanité des hommes. Une orientation que le réalisateur explique de la plus prosaïque des manières. « Rappelez-vous que pendant la première guerre mondiale, beaucoup de chevaux, des milliers, mourraient en permanence. On les utilisait comme des outils, pour déplacer le matériel, les armes, les blessés, les provisions, et ce jusqu'à l'épuisement. Lorsque l'un d'entre eux mourrait de fatigue, on le remplaçait immédiatement par un autre, promis au même sort. Dans le film, lorsque le cheval se retrouve dans les mains de l'armée allemande, il sort de la ferme de Niels Arestrup. Il a été nourri, choyé, il est en forme. C'est ce qui explique que quand le responsable des animaux, Friedrich, tombe sur lui, il le trouve instantanément majestueux. Il rappelle comment était le monde et les hommes avant le conflit. C'est la raison pour laquelle tous ont envie de le protéger, de l'aimer. »

 



Dans un élan d'audace teinté de témérité, un confrère tenta l'impossible, obtenir quelques informations sur le futur de Tintin, et les albums prochainement adaptés. « Peter (Jackson) et moi avons décidé de ne pas cracher le morceau, le scénario n'est pas encore achevé, et nous ne voulons rien dire avant que ce soit le cas. Il ne s'agira pas d'un mélange de trois albums, mais nous comptons quand même en utiliser plusieurs, ce qui signifie donc qu'à nouveau, nous intégrerons des éléments de deux albums. (...) Le chien de The Artist est incroyable, d'ailleurs, il ferait un formidable sidekick pour Milou.» Une déviation qui fut néanmoins l'occasion d'aborder quelques questions techniques.

« Peter tient à me montrer ce que donne un film tourné en 48 images par secondes, la technique qu'il emploie sur The Hobbit. Il y a tient beaucoup, mais je ne sais pas ce que ça va donner. À dire vrai, j'ai un peu peur que le rendu soit trop télévisuel. Bien sûr, je jugerai sur pièces, mais je ne suis pas du tout certain du résultat. De plus, je veux travailler sur pellicule, j'aime ça par dessus tout. Je pense que tant qu'on en fabriquera, je tournerai avec. »

 



Le cinéaste en a profité pour réitérer son scepticisme quant à l'importance du numérique dans le cinéma. « C'est vous, public, qui décidez de la limite. Vous avez trouvé réussis mes dinosaures, parce que vous aviez envie de voir des dinosaures aussi réalistes. Je crois que si on met du numérique partout, si on en abuse, il sera rejeté par les spectateurs, qui diront : on sait que vous pouvez tout faire, tout créer, ajouter dix mille cavaliers de plus à une bataille. Mais nous voulons que vous nous montriez quelque chose de vrai, d'authentique. Quelque chose de majestueux et réel, comme le faisait David Lean. »

Cette conférence ne pouvait décemment s'achever sans prendre des nouvelles du long-métrage au titre le plus excitant depuis l'invention du titre, à savoir Robopocalypse, dont le tournage devrait démarrer dès septembre prochain. « Ce sera un très gros film, très spectaculaire, avec un gros budget, une guerre entre humains et robots. Un véritable pop-corn movie. Avec un message. Dans le pop-corn. Quand vous finirez votre énorme paquet, tout au fond il y aura un message. »

 

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