Sitges 2011: Jour 1

Patrick Antona | 8 octobre 2011
Patrick Antona | 8 octobre 2011

Démarrant sous un ciel méditerranéen plus que clément, la 44° édition du Festival International du Cinéma Fantastique de Catalogne vient de démarrer ce jeudi  6 octobre 2011 dans la douce station balnéaire de Sitges dans un rythme plus que soutenu, avec ses 160 films diffusés,  répartis en cinq sélections différentes, plus manifestations et autres évènements spécifiques, dont nous essaierons d’en extraire au mieux la substantifique moelle pour signaler les pépites à porter au pinacle et d’autres sur lesquelles il faudra  laisser un voile pudique de déception.

Déception pour commencer avec le drame sci-fi catalan Eva, qui a ouvert la compétition et qui devait illustrer à merveille le thème choisi pour l’année, à savoir les progrès de la robotique et l’avènement de l’androïde dans notre 21° siècle.  Premier long-métrage du catalan Kike Maillo, Eva propose une intrigue futuriste située en 2041, où un ingénieur de génie (le germano-espagnol  Daniel Brühl) tente de créer le robot parfait qui serait capable d’éprouver le libre-arbitre, recherches qui l’amènent à soulever un lourd secret familial, et  à provoquer le dilemme douloureux entre ses choix moraux et  ses désirs  utopiques. Plutôt efficace dans sa mise en scène et des SFX made in Catalogne qui n’ont pas à rougir de la comparaison avec les meilleures compagnies  américaines, Eva est malheureusement desservi par une narration mélodramatique qui rappelle les téléfilms diffusés en après-midi pour la ménagère de cinquante ans, et surtout des emprunts plus que marqués à des œuvres telles que Minority Report, Brainstorm et surtout Blade Runner, limitant grandement la portée d’un twist que tout bon spectateur aura anticipé depuis le premier quart d’heure du film.

 

 

Déjà évoqué sur EL  pour son premier passage au Festival de Toronto,  et voulant éprouver le fait qu’un deuxième avis est parfois conseillé comme pour le diagnostic d’une maladie, Intruders du plutôt bon réalisateur Juan Carlos Fresnadillo a confirmé son statut de parfait ratage. Tentative d’euro-pudding où se croisent Clive Owen, Carice van Houten et l’incontournable Daniel Brühl (sur Sitges en tout cas), ce film d’horreur qui était censé nous terroriser avec son nouveau boogeyman, le Hollowface, ne réussira qu’à nous faire éprouver ennui et même énervement. Énervement car son auteur affiche une prétention absolue à vouloir nous faire démonstration de sa bonne « gestion » du suspens alors que la majorité des ses effets tombent à plat, et ennui car la fausse bonne idée de la double narration censée se rejoindre pour un climax censé être surprenant est hautement décelable sans amener une ambigüité qui aurait été la bienvenue. Seule la vision fugitive de la nudité de la belle Carice, ou de ses lingeries de nuit parfaitement portés réussit à nous égayer de temps à autre mais le bilan est bien maigre. Qu’il semble loin le temps d’une réussite comme 28 Semaines plus tard.

 



Heureusement, la suite de la manifestation nous a amené quelque baume au cœur. C’est d’abord ce taré de Hitoshi Matsumoto qui s’y est mis avec son cartoonesque et inclassable Saya-zamurai aka Scabbard Samurai. Ceux qui connaissent déjà son délirant Symbol savaient plus ou moins à quoi à s’attendre (son premier film scandaleusement inédit en France était déjà un summum du slapstick et de surréalisme) mais planter son style inimitable dans l’environnement du chambara avait de quoi étonner au premier abord. Même si le second opus du réalisateur nippon n’atteint pas les sommets de délire du premier, force est de constater que sa mécanique du gag répétitif poussé jusqu’à l’extrême s’accompagne ici d’une jolie réflexion sur le monde du spectacle et d’une histoire de famille qui allie cruauté et tendresse, portée en grande partie par la talentueuse et gamine Sea Kumada. Garantissant quelques moments de fou-rire incongrus mais aussi de pures séquences d’émotion dont une fin douce-amère,  Scabbard Samurai est une petite merveille qui contentera ses fans de la première heure, reste maintenant à convertir les autres pour faire partager le talent de cet auteur à part.

Continuant sa tournée des festivals avant une prochaine sortie française qui se fait désirer (DVD ou cinéma), The Divide de Xavier Gens a été projeté à Sitges dans une version director’s cut allongée de quinze minutes, ce qui fait un métrage de 2h01 au total. Le thriller nucléaire du réalisateur français (et fan d’Ecran Large, on peut le noter) gagne en consistance, du fait d’une caractérisation plus poussée des personnages qui rend leur destin cette fois-ci plus intéressant à suivre dans la déchéance, dont une Rosanna Arquette qui en poupée déglinguée prouvant qu’elle a encore quelque  ressource à 53 ans. Même si ces quelques imperfections ne sont pas complètement effacées, surtout un second tiers qui aurait gagné à être plus rythmé, The Divide  réussit son pari d’allier drame en huis-clos avec parabole sur la déshumanisation, amplifié par ses performances d’acteurs dont un Michael Eklund qui gagne ses galons de comédien à suivre.

 

 


 

 

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