Venise 2011 : jour 7

Simon Riaux | 7 septembre 2011
Simon Riaux | 7 septembre 2011

Amis du cinéma bonsoir ! Ou bonjour. Sachez pour information que le rédacteur de cet article est en souffrance. Pourquoi ? Parce que rien ne va plus à Venise. Après avoir triomphé des Vaporettos, du manque de nourriture, de Philippe Garrel (du moins on espère, le temps d'incubation serait variable) et de la pluie, vos deux hérauts de la cinéphilie transalpine ont dû essuyer la plus terrible des tempêtes : la spectatrice complètement barrée. Les lignes qui vont suivre sont vivement déconseillées aux femmes enceintes, ou sur le point de l'être.

 

 

 

Le vrai visage de la peur (de dos)

 

Quelques secondes après avoir pris place pour la projection de Wuthering Heights (nouvelle adaptation des Hauts de Hurlevent), un sémillant couple dont l'âge cumulé ne peut être retranscrit par la mathématique euclidienne, est venu s'assoir à nos côtés. À peine les lumières éteintes et le film commencé, Madame s'est mis en tête de commenter ABSOLUMENT TOUTES les répliques d'un ton pour le moins méprisant, prouvant que l'italien n'est pas toujours une jolie langue. Vous pensez avoir déjà connu cette situation ? Détrompez-vous, car il nous a fallu une bonne demie-heure de « Chûûûûûûûûûûûût » et un viril (mais poli) « Would you mind shutting the fuck up ? » prononcé par l'un d'entre nous, pour faire taire la gorgone. Cette dernière ne se priva toutefois pas de larguer d'innombrables soupirs, quelques gutturaux raclements de gorge, et, en guise d'au revoir, un vent comme seul les tombaux transylvaniens en recèlent encore.

 

 

Voilà pour le calvaire. En ce qui concerne le film, nous étions très curieux de voir la réalisatrice de Fish Tank s'attaquer à la romance en costume. Attente qui ne fut pas comblée, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, Andrea Arnold transforme son héros, bohémien orphelin recueilli par une famille britannique en jeune mulâtre, ce qui surprend et a un effet tout à fait contraire à celui escompté (à savoir souligner la très grande violence du roman original). Les traitements infligés à celui que les protagonistes appellent « nigger » sont, la faute au contexte historique, beaucoup moins surprenants que les sévices infligées dans le roman par Hindley à son frère adoptif. Si malgré cet écueil, la première partie de ce film schizophrène est très réussie, la seconde heure s'étire en allers retour incessants et annihile la belle sensualité qu'avait su générer Arnold. Probablement l'artiste s'est-elle trompée en dilatant l'action et en arrêtant net son film à la moitié du texte originel, ce qui nous laisse sur un profond sentiment d'inachevé, tout cela malgré une esthtique réussie.

Nous nous faisions une joie de vous parler du film surprise... dont la projection a été annulée, et dont nous ignorons toujours la nouvelle programmation. Pourquoi ? Les sous-titres ont été égarés, nous a-t-on expliqué. Égarés ? Mais comment ? Nous n'avons pas la réponse à cette question.

 

 


 

 

Heureusement, il y eut la conférence de presse du Sono Sion, et d'un des deux films que nous aurons vus dans la nuit (un régal ces horaires), le Moth Diaries de madame Mary Harron. La première fut particulièrement intéressante, et permit au metteur en scène de nous expliquer comment et pourquoi son film divergeait tant de Himizu, le manga éponyme dont il est adapté. En effet, en pleine préparation lors de la catastrophe de Fukushima, il est apparu au évident à Sion qu'il devait changer son fusil d'épaule, quitte à s'engager dans un tournage guérilla. « J'étais dans cet énorme rush, parce que je voulais montrer le film au public aussi rapidement que possible.Toutes les scènes se sont radicalement transformées, dans le manga original, il n'y avait pas d'espoir. Mais après le 11 mars, je ne pensais plus devoir réaliser un film dénué d'espoir. J'ai cru que je devais l'apporter dans le film. »

 

 

Quand à Moth Diaries et ses jeunes filles en institution, aux prises les joies du vampirisme, Harron a rassuré son monde : « J'ai vu tout les Twilight avec mes deux filles, pendant un moment j'ai carrément vécu dans une maison Twilight... Mais mon film sera plus sombre, plus proche de Polanski. » On l'a échappé belle. Il est temps pour moi de prendre le chemin du Ferrara, qui m'attend avec 4:44 last day on earth, dont la rumeur prétend qu'il est catastrophique, mais que je suis assez impatient de découvrir.

Pour connaître le verdict, vous devrez attendre 24 heures de plus, Geoffrey m'ayant quitté pour visionner la chose, alors que j'apprends à l'instant (enfin, il y a une dizaine d'heures pour vous) que le Ferrara vient d'être changé de salle et retardé pour cause de problèmes techniques. Le moral en prend un coup, les nerfs aussi, et pour retrouver un peu du peps et des poignées d'amour qui font tout mon charme, je vais manger une pizza, avec supplément d'huile.

 

 

 

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